Dénoncé par des opposants à Anne Hidalgo, le conflit d’intérêt paraît évident. Qu’en est-il vraiment ? On cherche à joindre Paul Le Goff (Science Po, Essec). On appelle Noctis et, baladé de service en service, on tombe enfin sur… Paul Le Goff. Bingo ! Décontenancé par notre appel imprévu, celui-ci nous affirme que « tout est en règle » que son cas « a été soumis à la Haute Autorité de la transparence » et ajoute : « Il faut bien que je trouve du boulot ». Il prend les devants sur la question qu’on allait lui poser : « Je démens absolument que Noctis m’ait embauché en contrepartie de l’attribution par Bruno du Showcase ». C’est pourtant ce qu’affirment plusieurs opposants à Anne Hidalgo et à son premier adjoint. Selon eux, un accord aurait été passé entre Bruno Julliard et Laurent de Gourcuff, pape des nuits parisiennes, patron fondateur de Noctis. Ceux-ci comptent évoquer le sujet lors de la réunion du conseil de Paris qui se tient lundi et mardi."
On parle même à mots couverts de soirées très dénudées et autres partouzes mâles ! A mi-mandat Hidalgo est déjà en fin de règne ...
Nos lecteurs se souviennent du reste que le Showcase et ses surgeons sont des objets à scandales récurrents.
Il y a déjà quatre ans nous révélions que, dans le cadre du "réaménagement" des berges de la rive gauche, la mairie avait choisi un certain Addy Bakhtiar pour installer un restaurant-bar-club dans la culée gauche du pont Alexandre-III. Il exploitait déjà le célèbre Showcase, de l'autre côté du pont, sur la rive droite.
Adrien Samsam Bakhtiari, plus connu dans le monde de la nuit sous le nom d'Addy Bakhtiar, avait ainsi récupéré, au pied de l'esplanade des Invalides au cœur du VIIe arrondissement, l'intérieur du pont sur les quais bas, espace extrêmement convoité vu son merveilleux emplacement et le fait qu'il soit au débouché des berges réaménagées.
En novembre 2010, un appel d'offres avait été lancé pour l'exploitation de ce lieu de 733 m², occupé depuis de longues années par les Gardiens du pont, une association qui organisait des manifestations culturelles et artistiques et qui en fut évincée à son grand dam. La concession a été fixée à quatorze ans, alors que la préfecture de police avait demandé à ce que la fermeture des quais bas soit réversible, en cas d'embouteillages sur les quais hauts. Le conseil d'arrondissement du VIIe avait même voté contre cette attribution. Adieu les expositions et la culture, place à la fêêêêête sauce Delanoë.
Mais qui était donc ce fameux Addy Bakhtiar pour remporter ce beau morceau ? Petit-neveu de Chapour Bakhtiar, le dernier premier ministre du Shah d'Iran, il a investi rapidement et lourdement dans plusieurs boîtes et restaurant branchés parisiens : outre le Showcase, la Fidélité (Xe), Moune à Pigalle (IXe), la Villa avenue de Friedland (VIIIe), le Black Calvados (VIIIe) ou encore l'Opéra Restaurant (IXe) situé dans le Palais-Garnier même.
Son double succès sous le pont Alexandre III n'a pas calmé sa boulimie et l'Hôtel-de-ville a chanté ses louanges pour lui attribuer les lieux.
Hélas, Samsam a multiplié, avant cette attribution comme après, les embrouilles judiciaires. Qu'on en juge.
Le 18 juin 2008, soit avant l'attribution du pont Alexandre III par la ville, la cour d'appel de Paris a confirmé l'essentiel d'un jugement en référé du Tribunal de Grande instance condamnant une entreprise de Samsam pour non-paiement à la SPRE, la société qui gère les droits des artistes interprètes, de sommes pour avoir diffusé dans une discothèque des musiques pendant près de trois ans sans rien verser.
Le 2 mars 2013, Régine, fameuse et désormais canonique figure de la nuit parisienne engageait elle aussi une procédure contre Samsam. Elle s'est en effet étranglée en constatant que des sociétés du fameux Samsam "exploitaient sans son autorisation sa marque et son prénom dans le cadre du night-club situé rue de Ponthieu à Paris et cherchaient à échapper à leur responsabilité de manière artificielle, en appelant ce night-club 'Chez Régine' ou 'Régine Club Paris'", indiquait son avocat.
Ce même mois de mars 2013, les riverains du 57 rue Charlot (IIIe) ont, après une longue bataille au tribunal, obtenu gain de cause contre le bruit nocturne et les nuisances générées par un ensemble d'établissements festifs qui occupent tout l'espace limité par les trois rues Charlot-Forez-Picardie, résultat d'acquisitions successives et de transformations effectuées par Samsam et un associé.
A l'appui de leur demande, les plaignants avaient obtenu un procès-verbal de la police du IIIe et des mises en demeure du BACN (bureau d'action contre les nuisances) de la Préfecture de Police de Paris. Pas moins de seize mains courantes avaient été déposées contre l'établissement !
Or, l'association Vivre le Marais avait signalé au Delanopolis qu'elle a le plus grand mal à obtenir l'exécution de cette condamnation et le paiement par Samsam. "Bénéficiaire de faveurs municipales on attendrait de Bakhtiar un comportement plus citoyen" disent-ils. L'affaire fait grand bruit dans le Marais, au sens propre comme au figuré.
Les aménagements indigents des berges "redonnées aux Parisiens" selon la novlangue municipale ont au moins le mérite de valoriser un espace tout à fait privatisé géré par des mains expertes.
Bref, dès lors qu'il est question de nuit, de fête, d'argent et d'arrangements suspects, le pont Alexandre III en voit couler de fameuses !
A suivre ...