Des images vues pendant quelques secondes peuvent être reconnues une dizaine d'années plus tard, titre cette étude menée par une équipe du Centre de recherches cerveau et cognition (CNRS/Université Toulouse III - Paul Sabatier). Première à maitriser des paramètres clés (contexte émotionnel, ancienneté et/ou nombre d'expositions) cette étude repousse ainsi les limites connues de notre mémoire et ouvre la voie à d'autres recherches sur nos mécanismes biologiques de mémorisation et leur ancrage dans le cerveau. Si en cas émotion, une seule exposition peut parfois suffire à un souvenir à vie, en moyenne 3 expositions suffisent à 10 ans de mémorisation.
On savait déjà que le nombre de répétitions ou la dimension émotionnelle favorisent le processus de mémorisation à long terme, cette étude démontre que nous sommes également capables de stocker et de rappeler très longtemps après des données auxquelles nous avons été exposés une seule fois, et sans contexte émotionnel particulier.
La démonstration est ici apportée avec 24 participants testés en laboratoire il y a environ 10 ans alors exposés durant quelques secondes et successivement à des images simples et neutres émotionnellement. Leur mémoire est mise à l'épreuve 10 années plus tard, avec 2 tâches de mémoire successives permettant d'évaluer la capacité des participants à reconnaître les stimuli observés lors de l'expérience initiale. La première est une tâche à choix forcé aussi proche que possible de la tâche initiale, mais avec un nouvel ensemble de stimuli distracteurs (voir Task 1, illustration du bas). La seconde est un questionnaire Oui / Non demandant aux participants si les items présentés correspondent ou non aux anciens items. L'expérience montre que des images vues pendant quelques secondes peuvent être reconnues une dizaine d'années plus tard :
- en moyenne, les participants atteignent une performance de 55% de réponses correctes, un score supérieur à celui de participants qui n'avaient jamais vu ces images auparavant (51%), ce qui confirme un " effet mémoire " ;
- ce taux de performance atteint 57% de réponses correctes pour les images vues 3 fois ou plus lors de l'expérience initiale et peut même atteindre 70% pour certains participants ;
- 7 participants ont même donné 60 à 70% de bonnes réponses.
3 expositions suffisent à 10 ans de mémorisation : en moyenne, pour maintenir une image en mémoire pendant 10 ans, 3 expositions à cette image suffisent. Des traces mnésiques qui pourront ensuite influencer de manière directe des décisions, et même dans certains cas, produire un sentiment de familiarité.
Si les chercheurs souhaitent travailler maintenant à la compréhension des mécanismes biologiques sous-jacents, ils font l'hypothèse qu'un petit groupe de neurones hyperspécialisés plutôt qu'un large réseau, pourrait être responsable de cette capacité extrême de mémorisation.