Le dernier roman d’Olivier Norek nous emmène entre deux mondes, celui des guerres et des dictatures fuies par les migrants et celui de la terre promise, qu’ils prononcent Youké et qu’ils tentent désespérément d’atteindre depuis la Jungle de Calais, souvent au péril de leur vie.
Propulsant ses personnages dans le plus grand bidonville d’Europe, coincés entre l’enfer de leur pays d’origine et le paradis incarné par l’Angleterre, Olivier Norek, lui-même ancien flic, invite forcément à suivre deux policiers au cœur de ce beau merdier. Le premier, Français, tente de gérer cette zone de non-droit de l’extérieur tout en recevant comme consigne de regarder ailleurs. Le deuxième, originaire de Syrie, (sur)vit au cœur du camp, bercé par l’espoir de retrouver sa famille et sachant parfaitement qu’il vaut mieux regarder ailleurs au sein de cet endroit où règne la loi du plus fort et où même ce dernier doit faire attention de ne pas devenir fou. Animés par des valeurs d’entraide et de justice, tout deux vont se trouver un but commun : aider Kilani, un jeune soudanais que la vie n’a pas épargné, mais qui continue néanmoins d’arborer ce grand sourire qu’il aurait déjà du perdre depuis bien longtemps…
Olivier Norek délaisse donc le capitaine Victor Coste, héros récurrent de ses précédents romans (« Code 93 », « Territoires », « Surtensions »), au profit de deux nouveaux policiers issus d’horizons différents. Pourtant, au fil des pages, je n’ai pas ressenti cette lecture comme un polar à proprement parler, mais plutôt comme un témoignage impartial, mais poignant, de l’impuissance de notre société face au flux migratoire venu entasser la misère du monde dans la Jungle de Calais, peu de temps avant son démantèlement. En se plaçant à hauteur d’homme, l’auteur livre non seulement un récit particulièrement humain, mêlant espoir, écœurement, révolte, injustice, compassion et de nombreux autres sentiments, mais il livre surtout une vision d’ensemble de cette réalité toute proche, qui fait froid dans le dos tout en invitant à réfléchir. En nous faisant ressentir la détresse des Calaisiens, des camionneurs, des organisations humanitaires, des réfugiés et des policiers, Olivier Norek livre un message qui invite à refermer ce bouquin les joues rouges de honte et la main sur un cœur beaucoup plus lourd et plus gros qu’à la première page…
Excellente lecture !
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