Divinités prosaïques encloses dans la nuit des cuisines
Tabliers bleus ou blancs - puis à trente ans noirs
Nous avons langé les petits tendresse
Leur offrant inépuisables l'élémentaire
Angoisses apaisées au puits d'amour et source intarissable du lait de vie
Il en fallut des pas des peines des nuits
C'est fou ce que c'était prenant cette tendresse à pleins bras
Notre corps entier s'est crevé à la tâche de les faire croître
Rituels fêtes danses sérieux et surtout respect nous leur avons tout appris
Tout - respect et encore respect - ce n'était jamais assez
Eduqués à la dure
Ils ont été tirés vers le haut
Ainsi nous sommes nous fané à contrarier leurs désirs il les fallait obéissants
Puis un matin une aube d'été sans pourquoi
Nous les avons vus partir - souvenir très net du mouchoir ruisselant
On les barde de ferraille sur la tête aux bras
Ils creusent - les avions nous seulement conçus pour ça -
Tombes et tranchées
Tranchées et tombes
Les lettres étaient boueuses
Pleines d'amour pour nous lointaines et de haine envers les germains à deux pas
Fusées de détresse dans la nuit de l'Ailette
Qui éclairaient leurs bouilles épouvantées
Et dans la pluie des obus s'engloutit le respect imprimé à leurs fronts
Aujourd'hui assises dans le square pacifié les mères murmurent doucement les prénoms
Caressent les minois balancent tranquillement les petits corps qui s'envolent
C'est un chant qui se souvient de ce qui aurait pu être
La guerre n'est plus de saison
Les hommes se cherchent un nouveau rôle sur les rives de cet automne
Mais il est tard et les mères de novembre là-bas n'attendent plus de merci.