Aucun sans que l'intérêt ne s'en mêle. L'instinct en est témoin... nous sommes intéressés et prêts à tout pour nous rendre intéressants, pour susciter l'intérêt.
C'est notre essence même. Nous y tenons. Et ça nous maintient de l'intérieur. Nous avons beau prendre du recul, on n'échappe pas à ce genre de calcul :
Qu'est-ce que ça nous apporte ou qu'est-ce que ça nous rapporte ? Pas d'autre repère que ce qu'on y gagne ou ce qu'on y perd.
Nous trouvons intéressant ce qui nous rend intéressants. Inintéressant ce qui ne nous rend pas intéressants... une idée, un concept, une action.
Parce que nous ne pouvons faire autrement que d'être inter-esse comme on dit en latin, c'est à dire agrippés au son de notre propre voix, en osmose avec notre propre cause, enfermés bien au chaud, volets clos, dans notre propre coquille, qu'on croit pleine, alors qu'elle est toujours vide.
Parce qu'il s'agit de notre désir. C'est lui qui valide ou invalide... y trouve ou n'y trouve pas son compte.
Les latins ont un joli mot pour le décrire : "conatus".
C'est pour chacun le désir de persévérer dans son être, d'augmenter de volume en quelque sorte, d'être plus, d'aspirer à un supplément d'âme ou à un agrément de plus pour le corps. Une quête de plus-value. Accroissement du désir : il n'y a pas meilleur argument pour la volonté de croissance... pour grandir ou devenir plus grand.
On s'efforce à avoir plus de force... Force et désir, ça va ensemble jusqu'à la volonté de puissance... jusqu'à ce que je sois le premier, que je vous devance, que je l'emporte sur la concurrence.
Et tout au long de cette course, je ne fais rien que défendre mes intérêts, ma primauté, ma priorité, ma propriété : sa majesté le moi...
Le seul capital auquel on ne renonce jamais. Parce qu'il génère des intérêts parmi lesquels : l'intérêt d'exister.
"On n'est jamais mieux servi que par soi-même" dit le dicton.
Seule la mauvaise Foi prétend le contraire. Parce que l'autre n'intéresse personne.
La recherche d'intérêt est pour ainsi dire, consubstantielle à l'être vivant.
On vit avec. On ne peut pas vivre sans.
Autant se dire que le capitalisme avant d'être un régime économique est un régime biologique qui exprime notre élan vital. C'est le réel qui se moque de l'idéal.
Toute la question est de savoir où est notre intérêt ?
De le savoir ou de continuer à croire au père Noël ?
De couper la poire en deux en disant comme les protestants : que toute charité bien ordonnée passe par soi-même ?
De créer une ONG pour distribuer ou pour se faire du blé ?
D'abattre un tyran pour exploiter ses gisements ?
De faire le bien pour être le seul ou le premier à le faire ?
De réclamer de toute Justice des dommages et intérêts en guise de réparation ?
Où est notre intérêt ?
D'associer quelqu'un à un profit ou de s'associer à quelqu'un pour un profit ?
De se servir en premier ou en dernier ?
De donner aux autres à manger parce qu'ils ont faim ou pour ne pas se faire manger à la fin...
De rendre service en souhaitant un bénéfice ?
Cultiver son jardin ou empêcher le voisin de cultiver le sien ?
Où est notre intérêt ?
C'est le où qui pose problème.
Comment tu dis déjà ?
Oui, c'est ça : il est chelou... louche et nous fait loucher... parce qu'on ne sait jamais ce qu'il y a en dessous...
Mais figure-toi que c'est cette exploration permanente qui occupe tous les esprits.
Chacun ne faisant rien d'autre que chercher à fructifier son ego, à le fortifier, à le rentabiliser.
Le capital serait ainsi l'horizon indépassable de toute notre humanité.
Et si on est embarrassé, c'est parce qu'on sait qu'on ne peut s'en débarrasser...
Le dégagisme ne s'applique pas à moi!
Je suis peut être vide mais mon histoire est pleine d'intérêts.