Que dire de ce film sinon qu'il est admirable en bien des points.
Tout d'abord parce qu’il est réalisé par Claude Chabrol, excentrique artiste aux talents immenses, dont l'œil affuté sait depuis toujours comment mettre à nu l'âme humaine, dans sa complexité et son horreur absolue, lorsque celle-ci est emprisonnée dans les sombres codes sociaux. Chabrol est et restera toujours l'observateur le plus réaliste des relations humaines, des vices cachés des êtres aux doubles visages. Aviez-vous vu « l’ivresse du pouvoir », « la fleur du mal »?
Ensuite parce que Benoît Magimel y est extraordinaire dans son personnage de dandy moderne "border line", pour lequel on devine assez vite les failles d'une personnalité brisée par les liens d'un sang paternel n'ayant pas su être à la hauteur de son génie.
Et puis il y a aussi le grand Berléand, qui sait si bien jouer les âmes perverties du mensonge et de la volupté, son personnage a tout de Talleyrand ou du marquis de Sade, machiavélique manipulateur de la nature humaine, dont l'argile est si malléable dans ses mains. Gare aux roses si l'on ne sait pas comment saisir les épines! Ainsi parlait Zarathoustra, cher Nietzche!!
N'hésitez plus à aller admirer les magnifiques Mathilda May et Ludivine Sagnier, l'une et l'autre en filiation indirecte de part leur expérience de la pureté amoureuse mais décalées dans le temps : il y a dans le personnage de Mathilda May un ersatz de ce que fût le personnage de Ludivine Sagnier : la candeur, la splendeur et l'ostracisme de la jeunesse. Pour finir, tout l'art de Chabrol réside souvent dans un mécanisme déconstructiviste qui révèle les non-dits et étouffements de la lâcheté humaine et de son irrésistible attirance pour les tourbillons de l'enfer (à l'image de ceux de Dante).
A tous ceux qui aiment le cinéma d'auteur, ce film est une véritable offrande des dieux.