Le 17 octobre, c’est une grande voyageuse qui a posé ses valises chez Babelio pour rencontrer ses lecteurs. Si Emmanuelle Han connaît bien Paris – elle y est née et y vit toujours -, cette première soirée consacrée à l’un de ses livres avait tout de même un petit goût d’aventure. L’occasion pour elle de nous en dire plus sur ce qui a présidé à l’écriture du tome 1 de La Sublime Communauté : Les Affamés, paru chez Actes Sud Junior.
Voyages voyages
D’abord connue pour son travail de réalisatrice de l’émission Les Nouveaux Explorateurs sur Canal +, Emmanuelle Han a toujours eu de l’appétit pour la découverte d’autres horizons et cultures, l’exploration à la fois de manières de penser différentes et des territoires sur lesquels elles se déploient. « Pour écrire ce premier roman, je me suis principalement inspirée de mes voyages, des lieux que j’ai pu visiter lors de mes déplacements professionnels. C’est une manière très privilégiée de voyager, dans le sens où pour réaliser des documentaires, on doit forcément prendre le temps de s’acclimater pour rendre compte, et donc de partir pour un temps assez long, rencontrer un maximum de personnes sur place. Des lieux comme les chutes d’Iguazu ou l’Himalaya m’ont totalement subjuguée quand j’ai pu les admirer. Et certaines personnes croisées durant ces périples sont même devenues des personnages à part entière dans La Sublime Communauté. »
Si l’image reste un outil efficace pour partager ces aventures, l’écriture s’impose rapidement comme un médium minimaliste, aux possibilités infinies : « Durant ces voyages j’écrivais beaucoup, j’ai d’ailleurs toujours écrit. J’étais un peu frustrée par les formats, le calibrage qu’impose forcément une émission télé pour transmettre tout ce que je voulais partager. Le voyage est une expérience tellement riche ! Il faut plusieurs « boîtes à outils » pour en rendre vraiment compte. »
Quand la fiction sert le réel
Mais pourquoi choisir de passer par la fiction quand un essai ou un document, à l’image de la plupart des récits de voyage, auraient pu convenir à cette mission ? « Quand j’ai eu l’idée d’écrire un livre, j’avais dès le départ décidé d’en faire un récit fantastique. J’ai toujours adoré la SF, les dystopies, les contes, les mythes : pour moi tout ça se recoupe, et au fond c’est un peu la même chose. Je craignais quand même que ce mélange ne fonctionne pas, et j’ai mis du temps à trouver un équilibre. Mais pour moi, il était clair que le passage par la fiction me permettrait de mieux approcher la réalité, de l’utiliser comme filtre pour infuser le réel. Il faut parfois savoir s’écarter de la réalité pour mieux la saisir et lui rendre justice. »
Car si elle invente un univers aux multiples portes qui nous fait nous aussi voyager, Emmanuelle Han tient à délivrer un discours sur le monde qui nous entoure. Un propos qu’elle espère fertile : « Peu importe la raison qui mène à l’apocalypse dans mon récit. C’est toutes les raisons qu’on peut déjà deviner aujourd’hui, que j’ai juste poussées à l’extrême. L’épuisement des ressources naturelles est une raison largement suffisante, par exemple. Pour autant, je n’ai jamais été vraiment militante écologiste, je le suis devenue par la force des choses en voyageant. C’est simplement une question de bon sens quand on espère que soit préservée la beauté de la nature. Et c’est aussi un humanisme. Pour autant, je ne suis pas pessimiste, l’envie de faire autrement vient quand on est touché par la beauté des choses. Comme cette flamme éternelle, dont s’occupent seuls les Intouchables en Inde, utilisée pour allumer le bûcher lors de cérémonies funéraires. Alors oui la situation est alarmante, mais pas désespérée. Et je place tout mon espoir dans les générations futures aussi. C’était donc important pour moi que La Sublime Communauté soit lue par des lecteurs jeunes, même si le livre s’adresse aussi bien aux adultes, et qu’il contient certaines scènes assez violentes. Les enfants sont d’ailleurs très lucides sur la situation actuelle, et tout est encore possible. »
Une adaptation au cinéma ?
Plusieurs lecteurs présents à la rencontre ont relevé que la couverture de ce premier tome de La Sublime Communauté avait des airs d’affiche de film. L’auteur avoue elle-même : « J’ai dû m’habituer à ce visuel proposé par mon éditeur. Au départ, je pensais plutôt à quelque chose d’assez mystérieux, sans personnage, pour ne pas trop influencer le lecteur, et aussi car je ne me représente pas toujours visuellement les protagonistes que j’imagine. Là on a trois personnages face à l’objectif, mais qui gardent leur part de mystère, on ne voit pas tout d’eux puisqu’ils sont en partie dans l’ombre. » Si pour l’instant rien n’est prévu, on ne peut que souhaiter à Emmanuelle Han et son éditeur qu’un jour un studio daigne adapter ce roman au cinéma.
En tout cas, l’enthousiasme autour de la séance de dédicace laisse présager un beau succès pour le prochain tome, sur lequel l’auteur travaille en ce moment. « Je connais la fin de cette histoire, je sais où je veux en venir. Ce que je ne maîtrise pas encore, c’est le chemin pour arriver là. J’adore cette indétermination dans le processus d’écriture. J’ai moi aussi besoin d’être surprise par cette histoire. »
Retrouvez La Sublime Communauté d’Emmanuelle Han, publié aux éditions Actes Sud Junior.