Cet album est peut-être le moins joyeux du groupe et certainement le moins beau. Attention quand je parle de beauté, je parle de mélodies moins aériennes et plus chaotiques à l’image du tournant amorcé par le groupe depuis qu’il s’est reformé il y a 3 albums maintenant. Toujours aussi politique le groupe fait part au travers de sa musique de son malaise face aux événements du monde actuel ou tout au moins fait écho à cela.
Comme à son habitude, le groupe monte sur scène au compte-goutte après s’être fait précéder par une longue introduction de plusieurs minutes d’un son de basse continu. L’ensemble des cordes (contrebasse et violon) se lance dans une boucle telle une mélopée alors que le mot Hope apparaît en gros sur les écrans derrière eux. Ils sont rejoints par l’ensemble du groupe pour ‘Hope Drone’. Au fur et à mesure que le morceau passe du chaos à la mélodie, sombre, les visuels alternent entre des complexes HLM et des images de la bourse. Le message du groupe semble dénoncer le clivage qu’il existe entre misère sociale et l’accumulation de richesse.
Après ce premier morceau le groupe enchaîne sur ‘Bosses Hang’ et ‘Anthem for No State’ – magnifique ! Néanmoins l’effet « drone » de ces nouveaux morceaux ainsi que le fait que l’octet québécois fasse durer les morceaux finit par provoquer l’ennui en moi. Je me mets à regretter les fragiles empilements mélodiques du groupe. Malgré cela, le public fait corps avec la musique du groupe.
Le concert a débuté depuis plus de 45 minutes lorsque Mette Rasmussen – qui assurait la première partie – rejoint les Canadiens pour assurer la partie cuivre sur ‘Undoing a Luciferian Towers’. L’effet n’a pas réussi à me convaincre : déjà que le morceau est chaotique, l’improvisation de la saxophoniste m’a complètement fait sortir du morceau et je l’ai trouvée peu en phase avec le groupe. Le groupe a ensuite enchaîné sur ‘Moya’ et ‘Blaise Bailey Finnigan III’ soit l’ensemble du Slow Riot for New Zero Kanada. Des titres qui font tristement écho aux récents événements de Las Vegas. Mis à part la pertinence de ces morceaux et le fait qu’il était bien agréable de les entendre, les titres du dernier album joués en début de set souffrent de la comparaison avec leurs prédécesseurs.
En aparté, il faut mentionner le travail du 9e membre du groupe, celui du VJ. En effet, les projections sont assurées par l’ultime membre du groupe à l’aide d’anciens projecteurs analogiques 8 mm et de pellicules argentiques. Il est toujours assez prenant d’observer la minutie avec laquelle l’opérateur jongle avec ses pellicules. Les plans mélangent les plans urbains et les blueprints oldschool ou encore des longues séquences de voltige aérienne où un avion tombe tel une feuille morte.
Dire que Godspeed c’était mieux avant serait assez facile et injuste mais peut-être qu’il s’agit uniquement du fait que le groupe engagé se veut le reflet d’une époque ayant perdu son côté organique, de mouvements citoyens et populaires où la colère gronde ? Toujours est-il qu’ils veulent transmettre encore de l’espoir, notamment avec le mot Hope lors du premier morceau ou encore avec un titre comme ‘Undoing a Luciferian Towers’ – qu’on pourrait lire comme la nécessité du chaos (engendré par la révolte?) pour démonter le système actuel. De plus, à l’instar d’un morceau comme ‘Anthem for No State’, le groupe sait montrer sa maestria lorsqu’il s’agit de composer de belles mélodies. Mais il semblerait que ce ne soit pas le bon medium pour leur message en ce moment.