La caféine est connue pour " empêcher " le sommeil, mais si cet effet était médié aussi par notre alimentation ? Cette recherche très fondamentale du Scripps Institute (Floride) apporte ainsi des données importantes sur les liens possibles entre le sommeil et l'alimentation, et l'intérêt, notamment lorsqu'on mesure les effets de composés psychoactifs, d'étudier les deux comportements en même temps. Des travaux, présentés dans la revue Sleep qui débouchent sur un outil de recherche permettant de préciser les effets combinés de plusieurs comportements simultanément, sur la santé, ici, sur les mouches des fruits.
La caféine est connue comme un excitant capable d'éliminer la sensation de sommeil chez l'homme via des effets pharmacologiques sur le récepteur de l'adénosine. Néanmoins, de nombreuses études chez les mammifères ont montré des différences génétiques selon les sujets, dans la réponse à la caféine. Chez la mouche aussi, et même si elle n'agit pas par l'intermédiaire du récepteur de l'adénosine, la caféine prévient le sommeil.
Les scientifiques décryptent ici les mécanismes responsables de l'impact de la caféine sur les habitudes de sommeil, des mouches et peut-être des humains, et montrent que ce processus est bien plus complexe qu'une simple interaction caféine-récepteur.
Le comportement alimentaire médie l'effet de la caféine sur le sommeil : lorsque les scientifiques donnent à des groupes de mouches différents niveaux de caféine alimentaire, puis mesurent leur durée de sommeil sur un cycle de 24 heures, ils constatent que la perte de sommeil ne s'explique pas seulement par la prise de caféine. La caféine réduit la prise alimentaire et la durée de sommeil nocturne, mais, chez la mouche, seulement à des concentrations intermédiaires de saccharose. Globalement, la réduction du sommeil est fortement corrélée aux changements de prise alimentaire totale liée à la caféine. D'autres composés amers modulent également l'effet de la caféine sur le sommeil et la prise alimentaire. Les résultats suggèrent un effet majeur de la caféine alimentaire sur le comportement alimentaire de la mouche. Ces changements dans le comportement alimentaire peuvent influer dans la perte de sommeil médiée par la caféine.
Composés psychoactifs, alimentation et sommeil : La perte de sommeil liée à la prise de caféine apparaît comme médiée par des changements de comportement alimentaire eux-mêmes corrélés à la dose de caféine. Un constat qui suggère que les processus de sommeil et d'alimentation devraient être étudiés ensemble, en particulier lors des recherches portant sur la relation entre le sommeil et les troubles métaboliques. Plus largement, les auteurs concluent que les futures recherches sur des composés psychoactifs devraient tenir compte de l'impact potentiel de la nutrition dans l'évaluation des effets sur le sommeil.
Mieux comprendre les interactions entre des comportements multiples exige non seulement de cerner les effets respectifs de chaque comportement (e.g. l'alimentation et le sommeil) mais aussi de mesurer les effets des deux comportements simultanément. L'équipe développe ici un protocole spécifiquement conçu pour étudier les comportements liés au sommeil et à l'alimentation- ici chez la mouche. Le protocole, nommé ARC (pour Activity Recording CAFE), permet en effet de mesurer les deux comportements simultanément. Décrit dans une autre revue, Nature Protocols, le dispositif permet de suivre en continu la quantité de nourriture consommée par une mouche et sa position dans la chambre, ce qui indique si la mouche est éveillée ou endormie. Un dispositif qui pourrait être personnalisé pour étudier une variété de comportements simultanément, expliquent les chercheurs. A ce stade chez la mouche !
Équipe de rédaction Santélog