Un vieux poche
Bon ne comptez pas sur moi pour un résumé, pas un mot, par contre je ne résiste pas à l'envie de parler des quelques passages qui m'ont surpris, ou qui ont pris une tonalité nouvelle.
On peut se passer de l'adaptation
Tout d'abord la surprise d'avoir eu envie de rire, je ne ne souviens pas d'avoir ri adolescente tellement prise par la passion de Julien.
La critique féroce de la société est jubilatoire, mêlée à un anticléricalisme forcené cela donne lieu à des scènes très très croquignolettes, l' Evêque d'Agde s'entrainant à bénir la foule est tout à fait hilarant. Il faut dire que contre le clergé Stendhal ne fait pas dans la demi-mesure.
Mais je n'ai pas toujours ri, car par exemple les pages sur le passage au séminaire de Julien Sorel sont parfois sordides , Alain dit " Les pages du séminaire, dans le Rouge et le Noir, sont atroces "
Rappelons nous que Stendhal est celui qui a écrit " La seule excuse de Dieu, c'est qu'il n'existe pas ", une phrase à rendre vert de jalousie Nietzsche ou Michel Onfray.
Bien entendu les pages superbes sur la naissance de l'amour entre Mme de Rênal et Julien je les avais bien en tête, les mains qui se frôlent, le parfum des tilleuls, la douceur de la nuit, le jeu des échelles posées, cachées, déplacées.
Mme de Rênal et Julien Sorel
Di Lampedusa dit " A travers son Julien Sorel, Stendhal s'est exprimé lui-même, tel qu'il était réellement, avec ses ambitieux désirs. " Stendhal l'amoureux parfois éconduit a su transmettre ses désirs en effet.
Adolescente j'ai eu l'impression de céder au romantisme alors que Jean Prévost est d'un avis contraire " Cette fête de l'intelligence, servie par une technique si nouvelle, était profondément contraire à la tradition, à la mode romantique "
Parce que ce roman n'est pas bien évidement qu'une histoire d'amour fou, Di Lampedusa nous dit :
" Le Rouge et le noir est, principalement, une effusion lyrique et un roman d'analyse psychologique, mais c'est aussi la peinture d'une époque et un livre où les faits se succèdent rapidement "
" Les traits fulgurants que vous trouverez partout dans notre auteur, et qui font comme ces nettoyages de tableaux, les couleurs soudainement sont fraîches, les gens vivent, sans qu'on voie par quels ressorts, car le récit va courant. On commence peut être à comprendre le miracle de ce style dépouillé, si émouvant "
" relèvent d'une technique si raffinée qu'à première vue elle passe inaperçue.(...) le caractère des gens, nous le comprenons généralement à travers leurs actions, leurs regards, leurs balbutiements, la crispation de leurs doigts, leur silence ou leur éloquence soudaine, la couleur de leurs joues, le rythme de leurs pas, presque jamais à travers leurs propos, qui sont toujours des masques pudiques ou insolents de leur intériorité " nous dit l'essayiste italien.
" Les lieux qui doivent servir de décor aux épisodes cruciaux ne sont absolument pas décrits, mais suggérés par une simple présentation préalable : ensuite quand la scène s'y déroulera, le lecteur pourra utiliser l'image mentale qui s'est formée en lui avant ", dixit Lampedusa, j'ai feuilleté certaines pages et on ne peut qu'être d'accord.
Voilà comme promis je n'ai pas dis un mot de l' intrigue, j'espère néanmoins vous avoir donné l'envie de relire le roman comme Luocine l'a fait il y a peu.
" Les contemporains n'ont à peu près rien compris au Rouge et noir, et Stendhal ne s'en est guère soucié résigné à l'inévitable, et confiant dans le billet de loterie dont le gros lot était : être lu cent ans après "
Si vous cherchez une biographie de Stendhal c'est là
* la phrase est de Whistler mais Jean Prévost qui la note dans son essai, la trouve totalement adapté à Stendhal.
Petite bibliothèque Stendhalienne
Le Rouge et le Noir - StendhalLa création chez Stendhal - Jean Prévost - FolioStendhal - Alain - PUFStendhal - Albert Thibaudet - Hachette (uniquement à chercher d'occasion)
Stendhal - Giuseppe Tomasi Di Lampedusa - Allia