(Anthologie permanente) Christian Bernard, "Catelles pour Freundlich"

Par Florence Trocmé

Poezibao reçoit périodiquement une toute petite publication, un élégant feuillet A4 publié par walden n press, collection Trémas. La lettre quarante-cinq est dédiée, c’est souvent le cas, à des poèmes de Christian Bernard. Ils n’encombrent pas les étagères mais ils retiennent.
3. Ni loi

Trains de nuit disparus l'encrier
renverse la feuille où ils croisaient
sur les cendres des livres d'eau
sur l'eau des livres de bord
et des obituaires
noirs des fumées soufflées
sous les braises des lanternes
chinoises ou poissons de papier
Trains de fracas perdus
l'encre boit le soir coulé du stylo
lierres et pieuvres lâchés partout
pas de singe ni signe ni tricot
ni rien que du corpus
de mémoire boa constrictor
17 juillet 2017
4. Viatique

Hachez menu la ligne
de partage des mots
revenez sur la veine
centrale celle qui vous
savez fraye dans le vif
désintriquez lettre
après lettre encrez
encore la feuille déroute
regagnez votre respir
ou réensemencez re
sillonnez aller retour la
– N'en faites rien c'est
trop vite dit (la pierre
était le nom d'une maladie
20 juin 2017
6. L'Attention

Comprendrez-vous maintenant
qu'il ne faut pas confondre
l'eau et le vin
le style et le stylo
les pronoms personnels
et les consignes de sécurité
la plage et la grève
générale
les galets volubiles
de Lampi
à Patmos
et les aubes nucléaires
ou la fin des rossignols
mécaniques ?
Nîmes, 10 septembre 2017
Christian Bernard, Catelles pour Freundlich, lettre quarante-cinq, walden n press, Trémas, 2017.
Une page sur Christian Bernard sur le site Sitaudis
Photo de Christian Bernard, site Le Temps (référence)