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Extra-man

Publié le 08 octobre 2017 par Morduedetheatre @_MDT_

Extra-man

Critique de L’homme hors de lui, de Valère Novarina, vu le 7 octobre 2017 à La Colline
Avec Dominique Pinon, Christian Paccoud et Richard Pierre, dans une mise en scène de Valère Novarina

Cela faisait un bout de temps que je voulais découvrir Novarina. Je me souviens encore du Festival In 2015 où son Vivier des noms déchirait certains de mes amis : là où une partie voyait un chef-d’oeuvre, d’autres s’étaient profondément ennuyés. Comme j’aime bien ce genre de conflit et que moi aussi je voulais prendre parti (ya pas d’raison), je suis ravie d’en avoir eu l’occasion avec cette création au Théâtre de la Colline. Pour ma deuxième fois dans ce théâtre, c’est à nouveau un genre tout à fait original qui m’a été proposée et, il faut le dire, absolument génial.

Voilà ce que j’appellerai un ovni théâtral. Ce que j’ai vu ce soir ne ressemblait à rien d’autre, je ne sais même pas si Novarina se ressemble lui-même puisque c’était mon premier. Ici, pas d’histoire, pas de contexte, pas de situation. Simplement des mots, une longue logorrhée verbale d’1h10 dans laquelle il ne s’agit pas de suivre mais simplement de lâcher prise : c’est un voyage au coeur de la langue, une balade délirante où des inventions paraissent réelles et où l’on reconstruit un monde plus proche de la vérité et de la sensation. Je ne sais pas vraiment pourquoi ça marche mais les faits sont là : dans la salle, les rires fusent, pas toujours en phase, pas toujours de la même tonalité, mais rares sont les fins de tirade qui n’obtiennent pas leur pesant de rire.

Pour porter ce texte d’une richesse infinie, il fallait un monstre. Dominique Pinon s’avère être le candidat idéal car transmettre cette chose n’était pas acquise. Il le fait avec une telle fougue, un tel amour de la langue, une telle intelligence du ton que c’en est totalement jouissif pour le spectateur. Il a ce je-ne-sais-quoi d’hors du monde, cet homme hors de lui, un côté un peu lunaire et poétique qui sied si bien au style novarinien, mais il sait revenir sur terre lorsqu’il le faut, ce qui renforce encore la consistance de ce texte pourtant basé sur un grand jeu. C’est toujours jubilatoire de voir un acteur prendre autant de plaisir que nous autour d’un texte, et c’est sans doute la clé de cette réussite. Se donner corps et âme pour faire entendre un texte qui part de rien et ne va nulle part, c’est tout simplement beau.

Je n’aurais pu imaginer plus belle rencontre avec cet auteur. A voir. ♥ ♥ ♥

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