Jeudi 5 octobre (!) 2017
Dans
deux ou trois heures maintenant sera décerné le prix Nobel de littérature 2017 et je
n’ai qu’un souhait (renouvelé chaque année), celui de voir récompensé le génial
Roth, Philip Roth. D’aucun parient sur Haruki Murakami, Don
DeLillo. Je pense que Roth a toutes ses chances et tous les mérites. Il nous
régale depuis tant et tant d’années. Il me semble qu’il a arrêté d’écrire après
Némésis (Ed Gallimard, 2012).
Magnifique
Némésis (comme Exit le fantôme, comme J’ai épousé un communiste, comme La tâche
etc.) : Bucky est un grand athlète (javelot) et professeur de gymnastique.
Il est atteint de polyo, et culpabilise beaucoup de n’avoir pu participer à la
guerre (39-45) et peut-être mourir en héros. Mais sa guerre il l’aura. Une
guerre contre cette maladie qui l’a frappé et qui terrasse plusieurs de ses
élèves et au-delà, dans tout le quartier, dans tout Newark…
Magnifiquement
conté… « Écoutons » Philip Roth et ses anaphores (p143) :
« …
Cette hutte en rondins, simple et confortable, avec ses fanions aux couleurs des
écoles, ses pagaies décorées, ses cantines couvertes d’étiquettes et ses
étroits lits de camp avec les chaussures, les tennis et les sandales rangées
dessous ; avec, dormant en toute sécurité, cette bande d’adolescents
robustes, en pleine santé – cela semblait aussi éloigné de la guerre de sa guerre qu’il lui était possible de
l’imaginer. Ici, il avait l’amour innocent de ses deux futures belles-sœurs et
l’amour passionné de sa future femme ;
ici il avait déjà un élève comme
Donald Kaplow qui brûlait de profiter de ses leçons ; ici, il avait une
magnifique plage aménagée et des douzaines de jeunes, plein d’énergie, qu’il
pouvait former et encourager ; ici, à la fin de la journée, il avait le
grand plongeoir d’où il pouvait faire ses plongeons en toute tranquillité. Ici,
il était
protégé par le plus sûr des refuges contre le tueur déchaîné dans sa
ville. Ici, il avait tout ce don Dave et Jake devaient se passer, et don les
gosses du terrain de jeu de Chancellor devaient se passer, et dont tous les
habitants de Newark devaient se passer. Mais, ce qu’il n’avait plus, c’était
une conscience qui le laissât en repos… »
Si
vous n’avez pas encore lu Philip Roth,
jetez-vous sur n’importe lequel de ses romans, c’est un délice. Simplicité,
humour (et de belles histoires).
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