Les chercheurs de l'Université de Montréal (UdeM / CRCHUM) identifient une molécule qui stimule la réplication du VIH dans les lymphocytes T CD4 situés dans l'intestin et découvrent ainsi un moyen de ralentir la réplication virale dans le tractus gastro-intestinal. Une stratégie présentée dans JCI Insight qui permettra de réduire encore la charge virale persistante dans les réservoirs intestinaux.
Cette avancée pourrait ainsi mener au développement d'une nouvelle stratégie thérapeutique venant compléter le traitement antirétroviral (ART), pour non seulement améliorer le contrôle de la réplication virale chez les personnes vivant avec le VIH mais aussi réduire les complications associées à une infection chronique. Petronela Ancuta, chercheuse de CRCHUM et professeur à l'UdeM explique dans un communiqué, avoir d'ailleurs déjà commencé à tester des médicaments pour bloquer cette réplication et réduire ainsi l'inflammation de la muqueuse intestinale.
Le traitement antirétroviral utilisé pour traiter les personnes infectées par le VIH peut réduire la charge virale à des niveaux sanguins souvent indétectables et est efficace pour prévenir l'évolution de l'infection vers le syndrome d'immunodéficience acquise (SIDA). Mais le virus est tenace. Il se cache dans des cellules spécifiques du système immunitaire, les cellules T CD4, qui hébergent le virus et forment des réservoirs viraux dans divers tissus périphériques, en particulier dans le tractus gastro-intestinal. À l'intérieur de ces réservoirs, certains organismes viraux continuent à se répliquer, ce qui entraîne une inflammation nocive dans l'intestin.
Le tube digestif est un environnement propice aux réservoirs viraux : la recherche démontre que les cellules T CD4 qui migrent du sang vers l'intestin sont modifiées. En route, elles acquièrent les outils qui aident le virus à les infecter. L'identification de ces outils peut permettre de comprendre pourquoi l'intestin représente un environnement favorable au VIH, et donc le modifier à dessein. Les chercheurs montrent que les cellules T CD4 migrent du sang vers l'intestin grâce à certaines molécules marqueuses exprimées à leur surface, dont CCR6, qui agit comme une sorte de code postal pour les cellules et les dirige vers l'intestin. Les cellules qui expriment CCR6 sont donc des cibles préférentielles. Ici, par biopsies du côlon et du sang de personnes infectées par le VIH et sous TARV, les chercheurs constatent que les cellules T CD4, dans le colon, qui expriment CCR6, contiennent également une grande quantité d'une autre molécule, mTOR, un régulateur important des mécanismes métaboliques. En fait, la molécule mTOR s'avère en partie responsable de la forte vulnérabilité au VIH des lymphocytes CD4 T exprimant CCR6 et résidant dans l'intestin.
Interférer avec l'activité mTOR pour traiter : in vitro, sur des cellules de patients infectés par le VIH et dont la charge virale était indétectable, les chercheurs parviennent, avec des médicaments existants, à réduire considérablement la réplication du VIH. On savait déjà que les médicaments inhibant l'activité de mTOR sont utilisés avec succès dans le traitement du cancer et du diabète et d'autres études seront nécessaires pour valider leur utilisation dans le traitement du VIH-SIDA. Mais les chercheurs les envisagent déjà pour compléter les traitements antirétroviraux.
" En ciblant spécifiquement les lymphocytes T CD4 portant la molécule CCR6, qui contient du VIH dormant, nous espérons que ces médicaments vont diminuer l'inflammation gastro-intestinale des patients, et à long terme, réduire la quantité de virus persistant dans les réservoirs intestinaux ".