En ces temps tumultueux où les syndicats reviennent dans la rue pour houspiller les ordonnances de Macron, où Mailly se fait rabrouer par ses troupes sous prétexte que son langage FO, heu, est faux, il est de bon ton d'évoquer le parcours de cet homme, syndicaliste réformiste et grand défenseur de la seconde gauche, celle des Rocardiens !
Le petit Edmond naît le 24 janvier 1931 à Epinay sur Seine alors que son père hait Pinay sur scène car le Maire de St Chamond l’empreint d’effroi de par sa posture d’héritier des tanneries de St Chamond ! Lui, Julien, n’est que cheminot et il inculquera à son fils des valeurs ouvrières pour bien l’aiguiller ! C’est pourquoi l’enfant grandit sur les rails prolétaires ce qui ne l’empêche pas de s’intéresser à la chimie. Il prend des cours au CNAM de Paris et sort de la cage aux fioles avec un diplôme dont les vilaines langues diront qu’il ne vaut pas pipette. Il devient technicien chimiste au centre de recherches de Péchiney, à Aubervilliers, après avoir travaillé dans les Peintures Valentine qu’il quitte vite car la promotion s’enlise : son âme sur la pente erre, noire !
Attiré par le syndicalisme et sans faire de vagues, Maire médite ère, année : on est dans l’ère industrielle de ce qui sera (on ne le sait pas encore) les 30 glorieuses et on se situe en 1958. Comment changer la vie des travailleurs ? En s’engageant comme responsable syndical. Il opte pour la CFTC (Confédération Française des Travailleurs Chrétiens) à l’époque où son crédo s’écrit à l’encre et tient !
Mais, en 1964, la CFTC opère sa déconfessionnalisation tant l’attachement au culte se fait sale haï, cité comme l’arrêt public à tout modernisme ! En naît la CFDT, ne se revendiquant plus des valeurs chrétiennes mais sans pourtant jouer luth dégueulasse qu’affectionnent les marxistes de la CGT.
Edmond est élu secrétaire général de ce nouveau parti, heu, syndicat ! Il le sera de 1971 à 1988 ce qui fera dire d’un de ses collaborateurs s’adressant à sa génitrice « Avec lui rien n’est éphémère, c’est ça l’effet Maire et avant lui rien n’était fait, mère ! »
Après mai 1968 et ses quelques petites plages trouvées sous les pavés, la CFDT prône l’autogestion des entreprises ! Le fait que le patronat n’y entend que l’écho mort outre Maire ! Il veut un conseil d’administration aux mains des salariés ! Cette noble idée est d’ailleurs reprise par le Parti Socialiste ! Le concept prend le nom de PID (Produit Intérieur Démocratisé) avec pour base la création de valeurs ajoutées sans impulsion verticale (du patron vers les travailleurs) mais avec une synergie horizontale (la cogestion). Sur le PID Maire veille mais, hélas, le PS se prend une veste aux élections législatives de 1978 et Maire doit revoir sa copie.
La CFDT laisse de côté l’utopie de la cogestion et se focalise sur la défense des salaires car les sales ères de la peur affluent : peur du chômage, des délocalisations brutales… La crise démarre, fixe un terme aux 30 glorieuses, fait instaurer le plan Barre, le blanc part, le gris pâle grippal nous échoie sans choix. Giscard se demande quel rôle va jouer Edmond dans ce grand coup de parapluie !
- Quel Maire est-ce, déclare Valéry ?
Austérité, encadrement du crédit ! L’avenir nuageux, plus vieux, d’un noir épais paie l’aigre en Maire !
Mais l’homme fait preuve de résilience ! Il se rapproche de Rocard pour créer la « deuxième gauche ». C’est une gauche qui s’invite au banquet de la construction européenne, de l’autogestion, du refus du jacobinisme, du rejet de l’Etat-Providence. A ce banquet belle aube est liée ; Maire y noce (bêle, ô bélier Mérinos ?).
Mais les utopies flirtent mal avec la dure réalité du libéralisme ambiant. Et Maire, quand il dort, de mercantile, d’or, fait des cauchemars ! Il faut qu’il arrête ! Un vilain panier de crabes dira que c’est l’arrêt niais de Maire ! Les nuls !
Il laisse sa place à Jean Kaspar en 1988 et se reconvertit dans le tourisme social en présidant VVF (Villages Vacances Familles) puis il dirigera la société d’investissement solidaire France Active (aide à l’insertion).
Tout dernièrement, le 7 juillet 2016, il prononçait l’éloge funèbre de son ami, Michel Rocard, dans la cour d’honneur de l’hôtel des Invalides.
Qui viendra lui rendre les mêmes hommages ?