L’Asie est aussi l’objet d’intenses manœuvres par l’Etat fédéral, qui cherche à s’assurer de la pérennité de sa circulation maritime dans cette région du monde. De même, face à une concurrence asiatique de plus en plus importante sur les trois volets de la chaine de valeur maritime: construction navale, infrastructures portuaires et armateurs, l’Allemagne met en place plusieurs plans stratégiques pour consolider la puissance de son commerce maritime. La mutation du secteur place la question du maintien des 400 000 emplois liés à l’économie maritime au cœur des préoccupations allemandes.
Pour atteindre ses objectifs, l’industrie allemande axe sa recherche sur des produits à haute valeur ajoutée et « écologiquement propres ». L’Allemagne, par l’utilisation de l’argument écologique, cherche à façonner l’industrie maritime selon les spécificités et les avantages concurrentiels de ses entreprises.
Reste un défi structurel à relever pour l’Allemagne : la faillite du système de financement de l’économie maritime allemande. Les banques allemandes détiennent un quart des prêts maritimes mondiaux, représentant ainsi 100 milliards de dollars sur les quelques 400 milliards que totalisent les prêts mondiaux. La crise financière de 2007 et la crise maritime ont montré les limites du système Kommanditgesellschaft (KG), qui aujourd’hui tire le système bancaire allemand vers le fond.
La stratégie d’accroissement de puissance allemande se révèle enfin dans les organisations intergouvernementales. Au sein de l’OMI, l’Etat fédéral cherche à aligner les orientations stratégiques de l’organisation, pour la période 2018‐2023, sur ceux de l’Allemagne. Une telle manœuvre consolide la position de leader des entreprises allemandes qui voient leurs normes et leurs pratiques diffusées à travers le monde. De même, l’Allemagne pousse l’OCDE à une révision des règles de financement de navires, qui y voit une distorsion de marché en défaveur de ses champions nationaux.
La présence de l’Allemagne sur les mers asiatiques s’inscrit dans un rapport de force non‐dit avec la puissance chinoise. La Chine, mue par une vision stratégique audacieuse (route de la soie maritime), cherche à maitriser les routes commerciales allant de ses ports jusqu’en Afrique et en Europe. Face à une telle perspective, l’Etat fédéral multiplie les partenariats avec les pays d’Asie du sud pour faire contrepoids aux ports chinois, et limiter l’hégémonie chinoise sur les mers.
Une étude réalisée par Georges BONFILS, Boubaker BUZENET, Roberto FECAROTTA, Claire LE MEUR, Marion MONEIN et Louis‐Sixte QUETANT.
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