Stratégie de puissance de l’Allemagne dans et par le commerce maritime

Publié le 28 septembre 2017 par Infoguerre

Puissance exportatrice sans conteste au niveau européen, l’Allemagne mène une stratégie  d’accroissement de puissance dans et par le commerce maritime. Le pays s’érige en tant que  pivot commercial ‐ et politique ‐ européen grâce à sa puissance économique et sa situation  géographique. L’Allemagne capte l’essentiel du commerce maritime en mer Baltique,  et  affiche la volonté de devenir le hub européen de référence.

L’Asie est aussi l’objet d’intenses manœuvres par l’Etat fédéral, qui cherche à s’assurer de la pérennité de sa circulation maritime dans cette région du monde. De même, face à une  concurrence asiatique de plus en plus importante sur les trois volets de la chaine de valeur  maritime: construction navale, infrastructures portuaires et armateurs, l’Allemagne met en  place plusieurs plans stratégiques pour consolider la puissance de son commerce maritime.  La mutation du secteur place la question du maintien des 400 000 emplois liés à l’économie  maritime au cœur des préoccupations allemandes.

Pour atteindre ses objectifs, l’industrie allemande axe sa recherche sur des produits à haute  valeur ajoutée et « écologiquement propres ». L’Allemagne, par l’utilisation de l’argument  écologique, cherche à façonner l’industrie maritime selon les spécificités et les avantages  concurrentiels de ses entreprises.

Reste un défi structurel à relever pour l’Allemagne : la faillite du système de financement de  l’économie maritime allemande. Les banques allemandes détiennent un quart des prêts  maritimes  mondiaux,  représentant  ainsi  100  milliards  de  dollars  sur  les  quelques  400  milliards que totalisent les prêts mondiaux. La crise financière de 2007 et la crise maritime  ont  montré  les  limites  du  système  Kommanditgesellschaft  (KG),  qui  aujourd’hui  tire  le  système bancaire allemand vers le fond.

La stratégie d’accroissement de puissance allemande se révèle enfin dans les organisations  intergouvernementales. Au sein de l’OMI, l’Etat fédéral cherche à aligner les orientations  stratégiques de l’organisation, pour la période 2018‐2023, sur ceux de l’Allemagne. Une telle  manœuvre consolide la position de leader des entreprises allemandes qui voient leurs  normes et leurs pratiques diffusées à travers le monde. De même, l’Allemagne pousse  l’OCDE à une révision des règles de financement de navires, qui y voit une distorsion de  marché en défaveur de ses champions nationaux.

La présence de l’Allemagne sur les mers asiatiques s’inscrit dans un rapport de force non‐dit  avec la puissance chinoise. La Chine, mue par une vision stratégique audacieuse (route de la  soie maritime), cherche à maitriser les routes commerciales allant de ses ports jusqu’en  Afrique et en Europe. Face à une telle perspective, l’Etat fédéral multiplie les partenariats  avec les pays d’Asie du sud pour faire contrepoids aux ports chinois, et limiter l’hégémonie  chinoise sur les mers.

Une étude réalisée par Georges BONFILS, Boubaker BUZENET, Roberto FECAROTTA, Claire LE MEUR, Marion MONEIN et Louis‐Sixte QUETANT.

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