Pense aux plages, pense à la mer
Au lisse du ciel, aux nuages,
A tous cela devenant chair
Et dans le meilleur de son âge,
Pense aux tendres bêtes du bois,
Pense à leur peur sur tes épaules,
Aux sources que tu ne peux voir
Et dont le murmure t'isole,
Pense à tes plus profonds soupirs,
Ils deviendront un seul désir,
A ce dont tu chéris l'image,
Tu l'aimeras bien d'avantage.
Ce qui était beaucoup trop loin
Pour le parfum ou le reproche,
Tu vas voir comme il se rapproche
Se faisant femme jusqu'au lien,
Ce dont rêvaient tes yeux, ta bouche,
Tu vas voir comme tu le touches.
Elle aura des mains comme toi
Et pourtant combien différentes,
Elle aura des yeux comme toi
Et pourtant rien ne leur ressemble.
Elle ne te sera jamais
Complètement familière,
Tu voudras la renouveler
De mille confuses manières
Voilà, tu peux te retourner
C'est la femme que je te donne
Mais c'est à toi de la nommer,
Elle approche de ta personne.
Jules Supervielle
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