Tin Star est une nouvelle série de dix épisodes diffusée depuis le début septembre sur les ondes de Sky Atlantic en Angleterre. L’action, elle, se déroule de l’autre côté de l’océan en Alberta, dans la petite communauté de Little Big Bear. On y retrouve le shérif Jim Worth (Tim Roth), un ancien policier de la région métropolitaine de Londres qui vient tout juste de s’y installer avec sa famille. Pourtant, le calme auquel il aurait pu aspirer n’est pas au rendez-vous. C’est que la compagnie North Stream Oil caresse une expansion sans précédent et étrangement, tous ceux qui s’y opposent semblent mettre leurs vies en danger alors qu’une vague de crimes balaye le territoire. Nouvelle série aux allures internationales pour Sky, Tin Star pique définitivement notre curiosité après un pilote réussi, mais c’est dans les épisodes suivants que notre intérêt s’amenuise alors que le synopsis paraît plus que jamais décousu. Doit-on donner la chance au coureur ? On hésite encore.
Microcosme canadien
D’emblée, on sent que quelque chose ne tourne pas rond du côté de Jim étant donné qu’il reste coi quant aux raisons qui l’ont poussé à tout abandonner pour s’installer dans un si petit village. Et il ne faut pas non plus compter sur sa femme Angela (Genevieve O’Reilly) et ses deux enfants Anna (Abigail Lawrie) et Petey (Rupert Turnbull) pour nous en apprendre davantage. Pourtant, aussitôt sont-ils arrivés en poste que les ennuis commencent. C’est que lors d’une rencontre avec la population organisée par la North Stream Oil, il trouve le moyen de se mettre à dos par son opposition systématique la vice-présidente des relations avec les partenaires d’affaire Elizbeth Bradshaw (Christina Hendricks) et le chef de la sécurité de la compagnie Louis Gagnon (Roark Critchlow). La tension monte d’un cran quand l’une des amies de Jim s’étant opposé au projet d’élargissement est retrouvée morte près de l’autoroute. Mais encore plus dramatique est le déces de Petey et Angela qui est dans le coma après avoir reçu une balle dont Jim était la cible. Dans les deux épisodes suivants, on fait la connaissance de ceux qui ont perpétré l’attentat, dont Whitey Brown (Olivier Coopersmith) qui est aussi censé tuer Anna, mais qui s’attachant à elle, y renonce.
En additionnant les séries existantes et les nouveautés prévues pour le mois de septembre, à l’instar de son voisin américain, on ne peut dire que le Canada soit très diversifié dans ses créations de fiction. C’est que la moitié d’entre elles se déroulent dans les grandes villes et les autres « quelque part en Amérique du Nord », soit, à confondre avec les États-Unis. Du coup, rares sont les séries récentes (sauf quelques exceptions comme Cardinal (CTV) par exemple) où un lieu spécifique est si largement exploité qu’il finit par devenir un personnage à part entière. C’est le cas ici avec ce petit village qui produit du pétrole : la ressource naturelle fétiche de l’Alberta. Et Sky ne lésine pas sur les moyens dans sa mise en scène avec des prises de vue aériennes à couper le souffle de l’endroit où évoluent les protagonistes avec en son centre la North Stream Oil. Perdue au milieu des Rocheuses et des immenses plaines, presque prisonnière de la nature, Little Big Bear ressemble à un village fantôme s’apparentant aux vieux westerns où les plus coriaces dictent la loi. Et pour la faire respecter, on applique d’un côté la méthode forte, révolvers en main. De l’autre la méthode douce en rappelant à tout ce beau monde que c’est la North Stream qui paie pour à peu près tous les services de base de la localité.
À l’automne 2015, ABC se plantait allègrement avec son nouveau soap de luxe Blood & Oil. Un genre de Dynastie 2.0, ces trahisons et fortunes instantanées se déroulant au Dakota dans un contexte de boom pétrolier semblaient totalement d’un autre âge à mesure que l’action évoluait. Ce qui fait la différence en faveur de Tin Star, c’est que l’on s’intéresse plus particulièrement aux enjeux politiques en lien avec cet or noir. Au troisième épisode par exemple, on mise sur l’ironie avec ces messages corporatifs débités en voix off à l’écran. Entre ce qu’on nous dit pour vanter les bienfaits de travailler dans l’industrie pétrolière et les images que l’on nous montre, le contraste est total et surtout divertissant.
Un trou noir
Tout comme Revenge d’ABC, les premières images de Tin Star nous montrent un événement survenu ultérieurement et après on retourne en arrière. La méthode est efficace et donne du rythme au scénario alors que la tension ne cesse de monter entre Jim et la North Stream Oil pour atteindre son paroxysme en fin d’épisode. Malheureusement, dans les deux suivants on déchante rapidement. C’est qu’on s’imagine qu’entre l’arrivée du nouveau shérif et le meurtre accidentel de Petey, il s’est écoulé plusieurs mois et que c’est cette animosité entre le personnage principal et la compagnie que l’on approfondira au cours des prochaines semaines. Que nenni. Du coup, dans le second épisode on voit Jim et Anna évoluer tandis que leur famille est définitivement démembrée. Pourtant, leur réaction est assez terme est c’est tout juste si le shérif verse une larme. Certes, il replonge dans l’alcool alors qu’il était sobre depuis plusieurs années, mais on ne s’émeut pas outre mesure du drame qui l’a touché de plein fouet. Puis, le voilà qui se remet à enquêter sur le meurtre de la première victime. Le téléspectateur n’a tout simplement pas eu assez de temps pour s’identifier à eux et il est maladroit de la part des scénaristes de nous avoir confrontés avec un aussi gros drame sans s’attarder sur les tenants et aboutissants. En conséquence, il nous apparaît passablement ridicule qu’un membre de la famille de Jim ait été tué simplement parce que son père s’est objecté ouvertement conte la North Stream Oil lors d’une rencontre du village. Certes, on ne sait trop ce que nous réserve la suite, mais étant donné qu’au troisième épisode non plus on ne semble pas intéressé à revenir en arrière, ce manque de crédibilité entache la série et notre envie d’en voir davantage.
En tous les cas, Tin Star n’a pas à s’inquiéter pour son avenir. Le premier épisode a connu un très bon départ avec 340 000 téléspectateurs en direct et question de s’arrimer avec les nouveaux usages, offre aussi toute sa saison pour ceux qui voudraient l’enfiler d’un coup. Sinon, le deuxième opus a même été commandée avant que la première soit diffusée sur nos écrans. Enfin, c’est Amazon qui a acheté les droits de la série à l’étranger et elle est disponible à tous ses abonnés depuis le 20 septembre.
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