Auteur: Isabelle Arsenault & Fanny Brit
Edition: La Pastèque - 2013 - 93 planches
" Impossible de se promener aujourd'hui. Ni dans les couloirs de l'école, ni dans la cour, ni dans les escaliers du fond. Elles sont partout, comme leurs insultes griffonnées sur les murs. "
Crayonnée dans un style austère, en noir et blanc, Hélène se faufile dans les couloirs de son école. Elle n'a plus d'amies : elles sont toutes là, à la guetter, à se moquer de son poids, à écrire des saletés sur elle un peu partout. Elle n'est pas tout à fait sûre de savoir comment c'est arrivé. La cruauté enfantine, simplement.
Alors, pour s'évader de cette routine, Hélène lit. Soudain, les pages s'illuminent et se colorent pour nous raconter le pourtant si triste destin de Jane Eyre. Hélène va s'identifier à l'orpheline de Charlotte Brontë, pour mieux survivre à son quotidien.
Dès lors, Isabelle Arsenault & Fanny Britt ne cesseront plus d'alterner ces deux styles : l'un morose, en noir et blanc, l'autre fantaisiste, dans les décors de Jane Eyre. Jusqu'à les mélanger le temps de deux planches, le temps de l'irruption d'un renard sous les yeux émerveillées d' Hélène en voyage scolaire.
" Je ne veux pas qu'il se sauve.
Je veux qu'il reste là tout la vie.
Je veux qu'il soit le protecteur de la tente,
un sphinx, un garde du corps, un dragon. "
Le harcèlement est traité avec dureté, mais aussi comme une habitude, et c'est justement découvrir Hélène s'en accommoder qui est le plus désolant. Cela n'empêche pas aux auteures de souligner à tout instant la solitude de la jeune fille, et de marquer le mal-être dans l'écriture.
Le duo reconnaît la faute de la culpabilité et du manque de confiance en soi. Lorsqu'une fille ose tenir tête aux filles populaires, qu'elle se fait virer de sa tente mais qu'elle semble n'y accorder aucune importance, c'est une révélation pour Hélène. Bientôt, ses mauvaises pensées vont être chassées par les paroles de sa nouvelle amie. Joyeuse, bavarde, elle va remettre de la couleur dans le quotidien de Hélène.
Jane, le renard & moi est un petit conte qui n'a pas peur de son sujet difficile. Le mal-être d'une adolescente et l'intimidation y sont traités avec justesse. On peu regretter son impression éphémère, mais son optimisme fait du bien.
Le très bel article Fragments d'une (fragile) adolescence par Sandrine Meslet.