Atterrissage en Suisse

Par Ellettres @Ellettres

Changement de vie oblige, et suite à des questions de copinautes et copains IRL que je n’ai pas eu le temps de tenir informés, j’ai eu pour une fois l’envie de parler d’autre chose que de livres. Comme ma vie trépidante et les expériences qui en découlent sont ce que je connais de mieux (en-dehors des livres), ce post n’est peut-être pas si déplacé que ça, et vous donnera le cadre de mes futures lectures (bucoliques, les lectures) !

Depuis trois semaines, nous nous sommes en effet transplantés en Suisse, dans un village de carte postale près de Lausanne. Après moult formalités administratives (ici on fait dans la précaution et on ne craint pas d’exiger des tas de signatures sur des tas de documents), nous voilà installés dans notre maisonnette en bordure de champs peuplés de vaches bien grasses, pâturant dans leurs pâturages bien verts. J’ai retrouvé mon ordinateur, une connexion wifi : ouf c’est bon, la civilisation est à portée de clic ! Bambinette et Zébulette*, nos filles (3 ans et 1 an), sont elles en passe de se convertir en véritables petites Heidi, après un début de vie exclusivement citadin. Car oui, derrière notre haie se dresse la chaîne des Alpes déjà recouverte d’une neige fraîchement tombée jusqu’à 1200 mètres (nous sommes à 700…). Et l’on en est à s’extasier d’observer des vers de terre, des fourmis et un matou vagabond, déjà surnommé Grisette, dans notre jardin, sans compter les passionnantes activités des fermes alentour (comme le dressage de chiens ou de chevaux). Autant dire que le dépaysement est total.

C’est la première fois de ma vie que je suis maîtresse de maison (cette appellation pompeuse est une imposture, vu que je ne maîtrise rien du tout à : la chaudière, le tableau électrique, le compteur d’eau, et j’en passe). J’ai pu faire une liste des avantages (nombreux) et des inconvénients (il y en a) en revers de médaille de ma nouvelle situation :

  1. Avantage. Vivre dans une maison, c’est disposer d’un espace de dingue pour le rangement, et de pièces inconnues (en général) aux appartements parisiens, comme par exemple… une buanderie, le must-have suisse. C’est presque un plaisir de faire son linge dans un espace dédié, sans encombrer son lit/bureau/table basse de tas de vêtements fripés repassés : vis ma vie de desperate housewife ! Comme en plus 99% des maisons suisses disposent d’une cave qui est presque une maison bis, ranger devient un jeu d’enfant moins une prise de tête. / Inconvénient. Avec une maison qui compte quatre niveaux (de la cave au grenier), on a vite fait de grimper des escaliers 15 fois par jour. Pour peu qu’on n’ait pas de tête (ou des cartons à déballer), il vaut mieux avoir des jambes… (et je ne vous parle pas du ménage…) Réflexe à acquérir : systématiquement penser aux choses qu’on pourrait monter/descendre au moment de s’engager dans l’escalier.
  2. Avantage. Hiiii un jardiiiiiin ! Le fantasme de tout Parisien en mal de nature, réduit à cultiver des radis dans un pot de yaourt posé sur le rebord – noir de pollution – de sa fenêtre… Quand tu découvres qu’il y pousse du raisin et du romarin, tu te sens pousser soudain des mains vertes et un chapeau de paille sur la tête (mais tu restes un peu dubitative devant ta capacité à conserver ces plantes en bonne santé…). Voltaire, déjà, ne recommandait-il pas de cultiver son jardin pour mener une belle vie ? / Inconvénient. Qui dit jardin, dit… insectes et bestioles en tout genre dans ta maison, surtout quand tu vis dans le parage de fermes. Des 15 mouches qui tournoient autour de ta tête dans la cuisine, au mille-pattes trouvé dans la cave, et à la splendide chenille vert fluo nichée dans la plante d’intérieur, j’ai l’impression de passer un stage de survie en milieu hostile (oui, je fais partie de ces gens allergiques aux bestioles, mais j’me soigne). Quand j’entends mes deux fillettes pousser des cris suraigus à la vue de la moindre araignée (quoi, c’est pas mignon une araignée ?!), je me dis que la nouvelle génération n’est pas plus friande des petites bêtes que la précédente…
  3. Avantage. Vivre dans un village (suisse, accessoirement), c’est nouer des liens détendus avec son voisinage, faire grandir ses enfants dans un lieu de vie à taille humaine. Les Suisses rencontrés jusqu’à présent se sont montrés très serviables et courtois. Leurs rapports humains sont empreints d’une certaine douceur (on est bien au pays qui a érigé la non-violence en art de vivre et en principe politique !) Pour preuve, dimanche prochain c’est raclette-party dans notre quartier ! / Inconvénient. Il ne faut pas avoir peur de prendre la voiture pour faire la moindre course, je n’ai jamais autant conduit de ma vie ! Argument battu et rebattu dans l’opposition ville/campagne, rien de bien nouveau sous le soleil jusqu’ici… oui mais, sur la neige ? Notre village a un micro-climat polaire et quand il neige, c’est pas de la gnognotte ! (Pneus neige obligatoires à partir de fin octobre). Il arrive fréquemment que des voitures se retrouvent coincées au milieu de la route qui nous mène à Lausanne (là où je bosse). Et c’est là que la fille qui a eu son permis il y a deux ans et qui a des palpitations rien qu’à l’idée de faire un créneau, commence à trembler pour de bon… Sainte Rita, priez pour moi !

Bref, voilà un petit tour d’horizon, non exhaustif, de mon nouveau cadre de vie. Je poursuivrai peut-être une série de posts sur la vie à la suisse, selon l’humeur et l’inspiration. Alors même que la frontière française est à 50 km, j’ai l’impression de nager de découverte en hallu étonnement devant ce beau pays qui conserve jalousement ses merveilles dans un écrin précieux… Saviez-vous par exemple que ce week-end, c’était ce qu’on appelle « le jeûne fédéral », une tradition remontant au Moyen-Âge mais réinventée au XIXe siècle, où les Suisses sont censés jeûner en l’honneur de la Confédération Helvétique d’une… tarte aux pruneaux au déjeuner dominical ?! Du coup lundi c’était férié et les petits Suisses (hinhin j’ai pas pu m’empêcher de la faire celle-là) n’avaient pas école dans notre canton (ce qui n’est pas le cas dans tous – et Genève fait exceptionnellement son jeûne un autre week-end que le reste de la Suisse, ce qui me donne l’impression que les Genevois sont un peu les Anglais du pays).

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