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Suisse : la hausse des dons de corps à la science devient un phénomène économique et sociétal

Publié le 18 septembre 2017 par Daniel Leprecheur

Bâle, Zurich, Lausanne, … partout dans les facultés spécialisées, c’est le même son de cloche : là où il y a quelques années on devait annuler les cours faute de sujets à observer, aujourd’hui les stocks sont pleins, avec quarante-cinq à quatre-vingt corps à disposition selon les capacités de conservation. Le chiffre a de quoi surprendre, la tendance s’étant amorcé en 2014, dépassant visiblement les a priori concernant cette pratique.

Mais l’altruisme est-il l’argument majeur ? Pourquoi cet engouement ? Quelles en sont les causes véritables ? Les limitations ?

Une population vieillissante impliquée dans l’évolution de la société

Bien sûr les personnes disposées à céder leur dépouille aux centres universitaires arguent immédiatement de la volonté d’être utiles, d’aider la science, la recherche, de participer à la formation des futurs médecins et chirurgiens, avec la volonté de continuer à contribuer à l’action sociale même après leur ultime souffle.

Ce sont par ailleurs les retombées du vieillissement de la population qu’on ressent ici ; ce choix délicat est arrêté soit à l’aube de la soixantaine, au moment de prendre sa retraite, soit en fin de vie quand on atteint les quatre-vingt-dix ans.

Éclatement familial et isolement des anciens

Cette décision intervient généralement dans un contexte généralisé d’éloignement des familles et des enfants. Les personnes âgées demeurent autonomes plus longtemps, et la mobilité professionnelle amène les proches à s’installer à une certaine distance, ce qui espace les contacts, les échanges et la prise de décision en commun.

La volonté de donner son corps s’affirme souvent contre l’avis des intimes, ils n’en sont informés qu’à l’instant du décès, à leur plus grand désarroi du reste, car cet état de fait est encore très mal vécu par l’entourage.

Désir d’économie

Néanmoins, la cheville ouvrière de ce positionnement se révèle être l’impact économique. Les seniors qui prennent cette décision espèrent sauvegarder les frais d’inhumation qui se chiffrent en moyenne à 3000 euros pour des funérailles basiques.

Or il s’avère que les universités financent très souvent cette somme après avoir usé de la dépouille. L’objectif est donc d’épargner cette dépense conséquente à la famille, à l’heure d’une crise économique qui frappe durement les foyers. Certains n’hésitent pas à constituer des assurances obsèques pour que les proches récupèrent la prime complète tandis que leur dépouille est prise en charge par les écoles de médecine.

Des règles rigoureuses

Si ces dernières apprécient l’afflux de cadavres si importants dans le processus d’évolution des étudiants, notamment dans leur manière d’appréhender l’anatomie humaine, la proximité du corps mort et la maîtrise progressive des gestes chirurgicaux (l’usage de la réalité virtuelle en matière d’autopsies et d’opérations simulées n’offre pas de confrontation directe avec l’organisme), elles demeurent exigeantes sur certains points essentiels qu’il faut prendre en compte :

  • elles recourent à l’embaumement pour conserver les dépouilles, un processus long et complexe qui permet de garder les sujets sur plusieurs mois, voire quelques années ; les funérailles n’auront lieu que deux à trois ans après l’arrivée du défunt dans les locaux en moyenne et les familles devront s’armer de patience pour entamer leur deuil ;

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