Il y a quelques années, j’ai lu La bibliothécaire de Gudule, la plongée d’un enfant, enfermé dans une bibliothèque, dans le monde des livres. Le titre de Haruki Murakami semblait me promettre à peu près la même chose. Mais les formidables illustrations de Kat Menschik m’ont tenté et j’ai commencé la lecture que je n’ai pu lâcher avant de l’avoir finie. Il faut dire que ce livre ne compte qu'environ 70 pages, illustrations comprises.
Un enfant entre à la bibliothèque municipale. Il rend des livres et voudrait en prendre d’autres à quoi il a pensé en chemin. Les bibliothécaires qui l’accueillent me semblent proches des Assis de Rimbaud, « les yeux cerclés de bagues / Vertes » : le vieillard qui le reçoit derrière la porte 107 « portait des lunettes aux verres aussi épais que des loupes ». Je dois indiquer ici que j’ai porté, enfant, des vêtements sur lesquels étaient cousues des étiquettes marquées du chiffre 107. L’enfant va descendre dans un labyrinthe (l’avancée dans ces couloirs obscurs m’a rappelé le labyrinthe qui s’ouvre dans La maison des feuilles de Mark Danielevski et l’obscurité celle qu’on trouve dans certains livres des auteurs post-exotiques). Un autre moment du récit me rappellera La torture par l’espérance de Villiers de l’Isle Adam. Ces références ne seront sans doute pas les mêmes pour d’autres lecteurs, notamment pour les jeunes lecteurs qui s’identifieront sans doute au garçon retenu pendant plusieurs jours avec l’obligation de lire et d’apprendre par coeur trois gros livres dans lesquels son imagination va le transporter. Car tout se mélange peu à peu, la réalité, la fiction, dans un climat d’angoisse qui prend tout son sens à la dernière page.