Des assiettes harmonieuses, riches, originales, empreintes d’une joie de cuisiner
Un restaurant devenu une sorte de patrimoine national. Domaine du célébrissime Fernand Point et de sa femme Mado (Marie Louise), La Pyramide était le rendez-vous de tous les people existant en France et ailleurs dans le monde. Repas inoubliables, grandes fêtes, le chef recevait chez lui des habitués invétérés comme Sacha Guitry, Jean Cocteau et Jean Marais, Edith Piaf, Clark Gable, Colette, Charles Trénet sans parler des têtes couronnées et leur entourage. No limits était la devise de la maison, tant pour les boissons que pour le mets les plus nobles. Fernand Point était connu pour boire un litre de champagne par jour… en dehors des repas bien sûr. D’ailleurs, avec ses 120 kilos et sa relative petite taille, il en est mort. Nous sommes en 1955. Sa femme essaya tant bien que mal de faire perdurer le restaurant mais la magie n’y était plus et l’histoire se termina doucement. Fin de la première époque.
Patrick Henriroux est un gamin de la Haute-Saône, de parents et grands-parents paysans, comme on disait alors. Une vie pratiquement en autarcie au milieu des prés et des vaches. Seul, un oncle qui travaillait au Negresco à Nice et chez Taillevent à Paris lui met la puce à l’oreille du travail en cuisine. Ce sera son choix. Parcours classique de l’époque après les études professionnelles : Georges Blanc, L’Auberge Bressanne, entre autres, puis la Ferme de Mougins où il obtient sa première étoile en tant que chef. C’est là qu’il entend parler de la vente de La Pyramide. Quelques jours de réflexion/hésitation et le voilà parti à Vienne. Nous sommes en 1989. Début de la nouvelle époque.
Dans un premier temps, il reste en partie fidèle aux grands classiques de Point comme le Gratin de queues d’écrevisses, les filets de sole aux nouilles et la Poularde de Bresse en vessie. En parallèle, il développe son propre style qui lui vaut une étoile au Michelin un an plus tard, puis très vite la deuxième étoile en 1992, qu’il conserve encore aujourd’hui. Propriétaire des lieux depuis 1998 (vingt ans l’année prochaine), il est dans la plénitude de son talent et de son style. A cet égard, son Menu du Marché en est une preuve éclatante.
Après quelques amuse-bouches aussi variés que délicieux, le Suprême de pintade fermière est servie enrobée de magret fumé, jouxtant un foie gras et rhubarbe posés sur un sablé à la farine torréfiée. Il y a du monde, c’est très construit, très sophistiqué à la limite du précieux, pour un plat typique d’étoilé. Comme il fallait s’en douter, la rhubarbe prend trop le dessus sur le foie gras.
Original, inattendu, surprenant et fameux, le chef propose une grosse tomate cœur de bœuf rôtie à l’huile d’olive, et l’enveloppe dans un moelleux à la rigotte fraiche de Condrieu, le tout servi chaud dans une belle assiette creuse noire. Beau et bon à la fois, même si sur la distance le plat devient légèrement écœurant.
A l’arrivée de l’assiette, on est un peu surpris de voir une mince tranche de chorizo posée sur le Dos de lieu ce qui parait aujourd’hui un peu désuet, mais au goût on se ravise et on ravale nos préjugés tant la finesse et les saveurs harmonieuses sont au rendez-vous. L’ensemble repose sur un caviar d’aubergines, et quelques gnocchis de pommes de terre complètent un plat remarquable de classicisme bien compris.
La Circonvolution de fraises et fromage frais avec son sorbet à l’hibiscus – fraises des bois, est d’abord trop mignonne, ensuite elle est délicieuse et à la fois d’une grande finesse et d’une belle harmonie des saveurs. Une franche réussite.
Sans oublier, le Bec à Sucre, à base de chocolat et pécan absolument renversant.
Patrick Henriroux possède encore en lui cette force et cet amour d’une belle cuisine, en dehors des modes sauf pour la technique. Une cuisine qui épouse son temps sans renier un passé riche et toujours vivant surtout en ce lieu. Des assiettes harmonieuses, riches, originales, empreintes d’une joie de cuisiner encore très présente. Le chef est partout dans son établissement, au four et au moulin, au marché le samedi matin, au gastronomique, le matin au petit-déjeuner, et le soir au bistrot PH3. Une présence rassurante pour les équipes et les clients et le gage que l’on est ici dans une maison familiale qui vous respecte. Du coup, on s’y sent tellement bien…
14, boulevard Fernand Point, cours de Verdun38200 Vienne
Tél : 04 74 53 01 96
www.lapyramide.com
Fermé du 5 février au 9 mars
Fermé mardi et mercredi
Menu déjeuner (en semaine) : 64 €
Menus : 138 € – 170 €
Carte : 150 € environ
19 chambres
De 200 € à 240 €
4 suites
Petit-Déjeuner (absolument remarquable !) : 25 €
Fermé du 5 février au 9 mars
www.lapyramide.com
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