"Assis dans son énorme fauteuil, il regardait les drogués aller et venir. Ils le distrayaient ; même si ce n’était pas leur intention, ils le divertissaient. Quand ils entraient chez lui et le suppliaient de leur faire crédit, il en éprouvait un sentiment de puissance. Avec les femmes, c’était encore plus fort. Dès qu’elles manquaient d’argent, son esprit diabolique, pour se divertir, leur proposait des actes toujours plus inédits et monstrueux." Récit de la terrible descente aux enfers d’une jeune Black, superbe roman noir dans la lignée de Goodis, L’accroc, en grande partie autobiographique (et quelle vie !), est d’une telle trempe qu’il ne pouvait être l’œuvre que d’un très grand écrivain.
Donald Goines (1937-1974) a grandi dans le ghetto de Detroit. Formé à l’école de la rue, militaire en Corée puis au Japon, il découvrira la littérature en prison après avoir braqué une banque à l’âge de dix-huit ans. Toxicomane, maquereau, dealer et trafiquant, Goines est mort abattu chez lui de plusieurs balles dans la tête.
Un roman noir de chez noir sur l’enfer de la drogue. Tout y est. Plus âpre que « Ne mourez jamais seul » du même auteur. Très bon premier roman (1971), sans concession, sans espoir, sans manichéisme, ni moralisme. On est loin des drogués présentés comme des joyeux drilles chez Philip K. Dick. Ici, tout est sale, glauque, sordide. Tout le cheminement vers la dépendance à la drogue y est disséqué ("l’algèbre du besoin" chère à W.Burroughs). Quelques longueurs cependant. Pour adulte averti.
«[…] Je commence à comprendre que Dieu bénit l’enfant qui a déjà tout. » p.182
«[…] on peut pas truander tout le monde toute une vie. T’en possèdes certains et y en a d’autres qui te possèdent. » p.186
Editions Gallimard / Folio Policier - 248 pages
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