En tout cas, Pétain pensait cela. Alors, il semble qu'il se soit évadé de la réalité. Il paraît avoir oublié la guerre, et cru qu'il avait carte blanche pour réformer le pays. Pour cela, il fallait une souveraineté qu'il n'avait pas. D'où la nécessité de se donner l'illusion de la posséder, en précédant les désirs de l'occupant... C'était la "collaboration", l'illusion de participer à la construction d'une Europe nouvelle, avec l'Allemagne. La "révolution" que voulait Pétain a très vite tourné court. Vichy a été un chaos bien plus terrible que celui qui l'avait précédé. La majorité des Français a vite perdu ses illusions quant au régime et a cherché à traverser l'épreuve sans trop de casse.
Curieusement, alors que Pétain en voulait aux fonctionnaires, c'est à son époque que leurs effectifs ont commencé à enfler. L'Etat et l'économie, désormais planifiée, ont été pris en main par des technocrates d'élite, l'inspection des finances, déjà, et polytechnique. Ils admiraient l'efficacité allemande. C'est peut-être là l'héritage qu'il nous a laissé. Après une tentative calamiteuse d'en revenir à la IIIème République, avec la IVème, La France d'après guerre est sortie de Vichy.
(Baruch, Marc Olivier, Le régime de Vichy, 1940-1944, Texto, 2017.)