Le secret de la longévité réside-t-il dans le turnover de nos protéines ? Leur renouvellement pourrait en effet peser pour beaucoup dans le processus, concluent ces travaux du Salk Institute (La Jolla) et même être, tout comme les télomères, un marqueur utile du vieillissement. De nouvelles données présentées dans la revue Nature Communications qui contribuent à éclairer le processus du vieillissement, normal et pathologique et désignent de nouvelles cibles, marqueurs et thérapeutiques.
Ici, c'est l'étude des dysfonctionnements biologiques en cause dans les maladies rares qui permet d'obtenir des données précieuses sur le vieillissement et la santé normale. C'est en effet en examinant ce qui se passe dans un trouble rare du vieillissement, la progéria (ou syndrome de Hutchinson-Gilford) que l'équipe californienne identifie un processus spécifique touchant les protéines qui pourrait aider les personnes en bonne santé - ainsi que les patients atteints de progeria- à vivre plus longtemps.
La progéria est une maladie génétique très rare qui entraîne un vieillissement de 8 à 10 fois plus rapide et donc une mort prématurée. Une mutation rare se produit dans l'une des protéines du noyau cellulaire, la lamine A, mais jusqu'ici on n'a su expliquer comment une seule protéine défectueuse dans le noyau peut provoquer cette cascade d'événements pouvant aboutir à l'accélération du vieillissement. L'équipe a d'abord cherché à savoir si la mutation entraînait une protéine lamine A moins stable et plus courte.
Une accélération du processus de production de protéines : c'est après avoir mesuré le renouvellement des protéines dans des cellules cultivées à partir de biopsies cutanées de personnes atteintes de progéria et de témoins en bonne santé, que l'équipe constate que la protéine lamine A n'est pas la seule affectée dans la maladie et identifie un changement très important de stabilité globale des protéines dans les cellules, en cas de progéria.
Parallèlement au renouvellement rapide des protéines, l'équipe constate que les nucléolus, qui produisent les structures d'assemblage de protéines appelées ribosomes, sont agrandis dans les cellules prématurément vieillissantes par rapport aux cellules saines. Et la taille des nucléolus augmente avec l'âge dans les cellules saines, ce qui suggère que la taille du nucléolus pourrait non seulement être un biomarqueur utile du vieillissement, mais aussi une cible de thérapies pour contrer le vieillissement prématuré et le vieillissement normal.
C'est donc une synthèse des protéines hyperactive qui est identifiée chez les personnes atteintes de progéria et suggère à nouveau que la réduction de la synthèse des protéines peut prolonger la durée de vie et pourrait donc constituer une cible thérapeutique utile pour lutter contre le vieillissement prématuré et le vieillissement " tout court " : " La production de protéines est un processus extrêmement énergivore pour les cellules ", commente le chercheur principal, Martin Hetzer, vice-président du département sciences de l'Institut Salk. " Lorsqu'une cellule consacre des ressources précieuses à la production de protéines, d'autres fonctions importantes peuvent être négligées. Nos travaux suggèrent qu'une accélération du renouvellement des protéines pourrait induire un vieillissement prématuré ". Nous voici donc revenus aux mitochondries...
Ces travaux soutiennent d'autres recherches qui suggèrent également, chez l'animal, que la réduction de la synthèse des protéines augmente la durée de vie. Mais elle marque une étape, l'identification de ce rôle clé du nucléolus et son intérêt comme biomarqueur fiable pour le vieillissement.