Nous allions fêter un anniversaire. La réservation avait été faite depuis longtemps et nous décomptions déjà les jours en ce mois d'août, ravis d'aller tester la cuisine 2 étoiles de Patrick Jeffroy à Carantec.
L'endroit est superbe, la vue saisissante sur la jolie baie de Morlaix.
Malheureusement l'enchantement fut de courte durée.
Dès l'accueil, je ressens un manque certain de raffinement, lorsqu'on nous ordonne presque de poser nos sacs sur les bancs afin de ne pas déranger le service. Et le chien allongé près de la table voisine, il ne dérange personne ?
Nous sommes 4. Une jeune femme nous apporte 3 cartes en ajoutant que la 4eme sera " dispo bientôt ". Je patiente...
Et de la patience il va nous en falloir... 1h20 entre notre arrivée et l'entrée... Même l'amuse-bouche ne ponctue pas agréablement cette attente. La brandade au curry servie dans un simili pot de yaourt est plutôt grossière. Attendons l'entrée.
" C'est pour qui le tourteau ?? " me réveille de ma torpeur. Je suis la seule à avoir un couteau à poisson mais le jeune serveur ne semble pas le remarquer, je lève donc la main, comme à la cantoche.
Mon entrée est réussie (seule note positive de notre dégustation) : un pressé de tourteau aux herbes et artichauts, curry vert et lait de coco. C'est fin, suave, équilibré. Une très belle entrée.
Pour le reste de la tablée, l'expérience se passe moins bien. Les queues de langoustines et calamars snackés semblent perdus dans une présentation brouillon. Sous le monticule de fenouil et autres calamars un gros oeuf mollet (trop cuit, le comble !) impose son incohérence au milieu de l'assiette.
Mais nous ne voulons pas gâcher la fête, nous essayons de nous concentrer sur le positif. La vue est jusque là le seul point positif.
Juste avant les plats, le sommelier remplit nos verres mais la carafe coule et détrempe le pain de mon voisin de droite...
Les assiettes arrivent. Un petit cheveu sur l'une d'entre elles semble perturber le serveur. Qu'à cela ne tienne, il l'enlèvera avec le doigt, juste après l'avoir posée sur la table.
C'est à ce moment précis que la déception est intervenue. Alors que nous découvrons des dressages indignes d'un restaurant 2 étoiles (les 2 moules disposées sur ma barbue me dégoutent presque), les serveurs commencent à prendre part à notre conversation. Nous apprendrons ainsi que l'un d'entre eux regrette de ne pas avoir de barbe plus touffue...
Mon poisson est trop cuit, le chou disposé à la va-vite. Seule la sauce hollandaise tire son épingle du jeu.
Quant au canard, c'est affligeant. Les cerises non équeutées et non dénoyautées ont coloré le reste des légumes, la betterave mal rincée sent très fort la terre. Quel dommage de gâcher un si beau canard de chez Burgaud...
Nous ne ressentons rien. Aucune émotion à la dégustation. Seule la déception prime. Ce n'est ni abouti ni raffiné. Et certainement pas au niveau d'un 2 étoiles Michelin !
Le sablé sous le fraisier est complètement détrempé et le millefeuille de crêpes souffre d'une présentation bâclée...
A ce moment précis, nous avons presque hâte de quitter les lieux, sans même aller savourer un petit café au soleil devant cette vue incroyable.
Au moment de prendre congé, nous évoquons poliment une " légère déception ". La responsable part chercher le chef (nous ne demandions rien). Voici monsieur Patrick Jeffroy qui sort de ses cuisines, passablement outré d'apprendre que des clients sont déçus et souhaitent le faire savoir. Nous nous faisons insulter très vite, aucun d'entre nous ne peut en placer une.
Et le chef 2 étoiles de finir sur ces mots " vous commencez à me faire chier, barrez-vous, barrez-vous ".
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(Cette semaine, je vous parlerai du restaurant Les Orfèvres à Amiens, du chef Frédéric Barette, qui, lui, mérite certainement une étoile !)
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