Une pensée dans ma rue, Paris
Mon humeur paresseuse butine les bribes d'un tableau démesuré, sombre et chatoyant à la fois, la poésie de minuscules instants volés. Au détour d'une impasse, un plant de persil partage l'asphalte avec un mégot qui a poussé là par l'opération du Saint-Esprit. Vagabonde, une boule plumeuse de pissenlit vole au vent, se poserait presque sur l'épaule de la dame couronnée d'une extravagante chiffonnade de plastique, rue Bréa. Au lieu d'attendre au salon de coiffure que la chimie n'opère, la dame sirote un verre de cidre à la terrasse de la crêperie attenante. Je parcours deux petits kilomètres à vélo jusqu'à la rue Mouffetard, je me laisse porter jusqu'à la boutique de vrais-faux souvenirs parisiens fabriqués en Chine, la bien-nommée Obj'ai trouvé. Je trace encore ma route et chine un je t'aime sur un mur défraîchi de la rue de Sévigné. Je glane un C'est l'été, j'en d'août écrit à la craie bleue sur un trottoir de la rue Lamarck. J'attends des amis et j'observe mes voisins de tablée. Il lit Mémoires d'Hadrien de Marguerite Yourcenar, elle lit France-Dimanche. En couverture Johnny Hallyday refuse de s'alimenter. Je me serais peut-être abîmé dans l'empathie si mes amis n'avaient brusquement paru. Nous buvons la bouteille de vin blanc de l'amitié. Elle porte en bandoulière le soleil pour sourire et un sac brodé de fleurs et d'une maxime naïve comme je les aime : La vie est belle. En rose, évidemment.
La vie est belle, par Danielle