Quasiment dans un même souffle, et visiblement sans se rendre compte des contradictions que cela signifie, France Culture disait : le pape affirme qu'il ne doit pas y avoir de contrainte à l'immigration ; les entreprises allemandes installent des dispositifs, en Afrique du nord et en Europe de l'est, pour recruter et former des immigrés ; M.Hollande appelle à la modération quant à la réforme de l'emploi ; M.Macron part en Europe de l'est pour négocier une uniformisation des régimes sociaux.
Cela pose le problème des "universaux". Nous croyons à des absolus. Et cela nous empêche de penser. Qu'en est-il ?
Il est logique que les entreprises cherchent à réduire leurs coûts. Elles le font en grande partie en diminuant leur masse salariale. Même si ce n'est pas la seul fonction de l'immigration, c'en est une raison forte. M.Macron reprend un courant de pensée solidement implanté chez les économistes, de droite et de gauche, depuis fort longtemps. La liberté de l'individu et la performance de l'entreprise demandent de la flexibilité. C'est la raison des réformes du code du travail. Cependant, elle peut avoir des effets pervers. Notamment celui de conduire à aligner les salaires français sur ceux de pays n'ayant pas notre protection sociale. D'où les voyages de M.Macron.
A cela, il faut ajouter que la flexibilité est déjà parmi nous, et nous la payons au prix fort. Même si ce n'est pas aussi terrible qu'en Angleterre. Une grosse partie de la population, des stagiaires aux intérimaires, en passant par les consultants indépendants et des livreurs à vélo de la transformation numérique n'ont quasiment plus aucune protection. En même temps, ils n'ont aucun poids politique, aucune voix. Même ceux qui ont un emploi, des syndicats et l'affection des partis politiques, n'ont pas intérêt à ce que la Ligne Maginot actuelle soit maintenue. Car si le hasard veut qu'ils soient licenciés, alors ils connaîtront la précarité.
Ce que veut réussir M.Macron, ce n'est pas la flexibilité, c'est la flexisécurité. C'est le système que les pays du nord de l'Europe ont mis en place. Va-t-il réussir ? C'est une autre question. Seulement, se braquer sur des absolus nous empêche de contribuer à sa réflexion, et de lui éviter, peut-être, des erreurs.
(M.Macron essaie peut-être de réussir un autre changement : changer la logique des affaires. La logique de réduction des coûts conduit à une spirale déflationniste. Si le dirigeant ne peut plus compter sur la variable masse salariale, il pensera peut-être qu'il doit augmenter ses revenus. Ce faisant, il va être amené à se demander ce que son entreprise peut bien apporter de nouveau au monde. C'est ainsi que l'on relance la croissance.)