Dans un précèdent article, je vous parlais de l‘euthanasie des handicapés physiques et/ou mentaux pendant le IIIeme Reich. Aujourd’hui, je garde ma plume guillerette pour une autre fois et je vous raconte l’histoire de la loi du 14 juillet 1933, celle qui impose la stérilisation pour certains malades, parmi eux, les sourds, les aveugles, les alcooliques, les schizophrènes… Nous parlerons aujourd’hui des personnes atteintes de surdité totale ou partielle.
La politique eugéniste de l’Allemagne nazie
Vous commencez à le savoir, le gros délire de l’Allemagne nazie est d’avoir une race pure et pour ça, elle lutte activement contre la dégénérescence raciale et l’augmentation des populations dites « nuisibles » comme les juifs (ben oui), les malades mentaux, les homosexuels mais aussi les sourds. Ouais, les sourds. C’est assez dingue, sans mauvais jeu de mot, on n’entend jamais parler d’eux, c’est pas une communauté franchement unie et dangereuse (je dis pas que les juifs ou les homos le sont plus hein, attention) et pourtant les nazis comptent bien les faire disparaître. Progressivement.
Tout commence aux USA, ou l’eugénisme est très présent à la fin du XIXe siècle. Alexander Graham Bell a beaucoup travaillé sur la surdité et il en a conclu qu’elle est héréditaire et que des parents congénitalement sourds sont plus susceptibles de faire des gamins sourds que des bien entendants. De fait, la solution est toute simple : il faut leur interdire le mariage ! Et si ce n’est pas suffisamment efficace, on va les stériliser.
Avec Hitler au pouvoir, les eugénistes sont nombreux et influents dans le milieu nazi, ils reprennent les théories de l’Américain Alexander Graham Bell et ils rajoutent une dernière petite étape. Si malgré l’interdiction du mariage, la stérilisation, ou l’avortement contraint (si une femme est enceinte, on l’avorte de force sans compter le nombre de semaine et sans se demander s’il est viable ou non).la surdité persiste, on va les exterminer et le problème sera définitivement réglé avec l’aktion T4. Enfin, c’est ce qu’ils pensent.
La loi du 14 juillet 1933 sur la stérilisation forcée
Trois hommes sont à l’origine de la rédaction de la loi du 14 juillet 1933, Arthur Gütt, un médecin et haut fonctionnaire nazi, Ernst Rüdin, un psychiatre suisse et Falk Ruttke, un juriste. A eux trois, ils se prennent pour les rois du monde et décident qui dans le monde a le droit de se reproduire, et qui n’en a pas le droit. La loi entre en vigueur le 1er janvier 1934, elle impose la stérilisation pour les personnes atteintes de neuf maladies considérées que l’on pense être héréditaires (la surdité, la cécité, l’alcoolisme, la schizophrénie…). Concrètement, au sein de la communauté médicale allemande, personne ne moufte, tout le monde est assez d’accord avec le principe. Disons-le l’eugénisme n’est pas une idéologie nazie, non, c’est à la mode partout dans le monde. Et en Allemagne, on en a rien a cirer de faire souffrir plusieurs minorités de personnes, ce qu’il faut c’est voir grand : la race. Elle doit être pure, n’avoir aucune imperfection.
La mise en pratique de la stérilisation contrainte
Il existe différentes méthodes de stérilisation, et vu que les nazis ne font pas dans le sexisme (enfin pas pour ça quoi) tout le monde en est victime, hommes et femmes. Les hommes sont castrés par rayons X ou par voie opératoire. Au départ, durant les années 1934 et 1935, on utilise les rayons X mais rapidement, ça coûte beaucoup trop cher à l’Allemagne nazie, alors on pratique des opérations au niveau des testicules et le tour est joué. Pour les femmes, il y a l’option de tout enlever à l’aide d’une opération, mais le médecin Carl Clauberg propose autre chose pour gagner du temps, une injection dans l’utérus.
Le docteur se vante de pouvoir stériliser 1000 femmes en une seule journée grâce à cette méthode. Oui, mais une injection de quoi ? De produits corrosifs, notamment de l’acide. Ça bouffe l’utérus et tout ce qu’il y a autour, c’est une véritable torture physique et psychologique pour les femmes. D’ailleurs, les douleurs sont telles que plusieurs femmes meurent d’arrêt cardiaque liée à l’intensité de la douleur. Qu’il s’agisse des tests ou des tentatives de stérilisation, le nombre de décès est important. Et conséquence directe des stérilisations, les personnes devenues stériles refusent de se marier et beaucoup se suicident car se retrouvent rejetées par la société. Bonne ambiance.
C’est principalement dans le camp de Ravensbrück que les expériences ont été menées sur des femmes enfermées appelées « les lapines »… Oui, car avant de faire des tests sur des humains sous prétexte de leur religion, leur sexualité ou leur handicap, on le faisait sur des lapins…
Le nombre de victimes
Il est assez difficile de connaître le nombre exact de personnes sourdes victimes de stérilisation contrainte, en effet, si l’on sait que l’Allemagne nazie a procédé a la stérilisation d’environ 400 000 personnes il est rarement précisé de quelle nature était leur handicap dans les registres nazis. De plus, de nombreux documents ont été supprimés de manière volontaire, perdus, ou ont disparu dans les bombardements.
On parle généralement de 15 000 sourds et sourdes stérilisés de force entre 1934 et 1945 en Allemagne et les territoires annexées après 1937.
En revanche, selon Horst Biesold, le nombre est plus important, il estime que sur les 50 000 à 100 000 sourds allemands, il y a eu entre 20 000 et 30 000 stérilisations forcées. Selon les chiffres officiels (registre avec la mention « sourd ») 1600 personnes ont été exécutées dans le cadre de l’aktion T4 et 6000 ont été déportés et morts dans les camps de la mort. Le nombre de victimes (toutes tortures confondues) s’élèverait alors à 40 000.
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