Parfois tu te rappelles
que l’endroit donne sur la mer,
De temps en temps tu vois un goëland
s’élever
vif vers le soleil étincelant
dans des couleurs éblouissantes jouant
avec les éclats du midi.
Toujours si vif, si bref
La nuit tu te remémores toute la vision
tandis que la porte est verrouillée.
Extrait de : Kofi Awoonor : cycle des poèmes de prison, The House by the Sea, 1978. Traduit de l’anglais (Ghana) par Jean-René Lassalle.
The place
You remember sometimes
that the place is by the sea,
And once in a while you see a gull
rise
swift against the blazing sun
in dazzling colors playing
in the shards of a noonday.
It’s always so swift, so brief
At night you recall it all
while the door is locked.
Extrait de : Kofi Awoonor : cycle des poèmes de prison, The House by the Sea, 1978.
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Graines et larmes
La roche de la rivière depuis longtemps
s’est résignée au froid ;
où sont allés les crocodiles femelles
quand les flammes ont frappé le village ?
Où sont-ils allés
quand le feu a réduit les logis à des moignons de murs ?
Un grain grandi dans des champs de larmes
pour des orphelins inassouvis
suppliés de se laver les mains,
est un repas de vie
Pars et dis-leur que j’ai payé le prix
Je me suis accroché à la vérité
J’ai combattu la colère et la haine
au service du peuple.
J’ai mangé leur maigre pain dans les casernes
partagé leurs pas et leurs larmes
au nom de la liberté
Un jour dans une maison d’esclaves à Usher j’ai promis
de reporter ma mort
jusqu’au matin d’après la liberté.
Je le promets.
Extrait de : Kofi Awoonor : Until the Morning After, 1987. Traduit de l’anglais (Ghana) par Jean-René Lassalle.
Grains and tears
The river rock has long resigned
itself to cold;
where did the female crocodiles go
when fire hit the village?
Where did they go
when fire reduced the houses to stump walls?
A grain grown in tears fields
for orphans not satisfied
implored to wash their hands,
is meal of life
Go and tell them I paid the price
I stood by the truth
I fought anger and hatred
on behalf of the people.
I ate their meager meals in the barracks
shared their footsteps and tears
in freedom's name
I promised once in a slave house at Usher
to postpone dying until
the morning after freedom.
I promise.
Extrait de : Kofi Awoonor : Until the Morning After, 1987.
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Dont la chair hérita
Des éclairs de lumière aurorale
rayon
étoile
En agonies de joie, comblées, reniées.
Quoi qu’il y ait, existent le rite et la cérémonie
Les fonctions non accomplies.
Et chair faiblit face à l’agonie de la mort
Les larmes deviennent eau infusée d’herbes amères.
Elles nous accompagnent
Mais nos pensées s’envolent cherchant des lieux
jamais présents.
Par delà le crépuscule
La couleur en myriade et la splendeur de l’arc-en-ciel
Confirment notre immortalité.
S’effrite l’étreinte des enveloppes charnelles
tandis qu’une résurrection nous est dévolue
Vaste au pied de la croix sur le calvaire
Et nous prions pour nous à l’heure de notre naissance.
Extrait de : Kofi Awoonor : Rediscovery, 1964. Traduit de l’anglais (Ghana) par Jean-René Lassalle.
That flesh is heir to
Flashes of dawn light
beam
star
In agonies of joy, fulfilled, denied.
Whatever is, is the rite and ceremony
The functions unperformed.
Flesh weakens before the agony of death
And tears become the brewing water of bitter herbs.
These are with us
Yet our thoughts soar searching for lands that are
never there.
Beyond the twilight
The myriad color and the dazzle of the rainbow
Confirm our immortality.
The mortal coils of flesh peel off
and resurrection awaits us
Large at the foot of the cross on Calvary
While we pray for us at the hour of our birth.
Extrait de : Kofi Awoonor : Rediscovery, 1964.
Choix et traductions inédites de Jean-René Lassalle.
Biobibliographie de Kofi Awoonor