Magazine Culture
Je ne vais pas casser l'ambiance tout de suite et tenter de vous décrire l'image fatale des tonnes de romans de la rentrée qui finiront au pilon.
Au pilon, L'Express de cette semaine y verrait peut-être bien trois romans à paraître ces jours-ci - je rappelle que les premiers livres de la rentrée littéraire arrivent demain chez votre libraire (ils y sont déjà, bien entendu, il ne reste qu'à préparer les tables de nouveautés et à les garnir des coups de cœur). Donc, à L'Express, Marianne Payot n'a pas aimé Le jour d'avant, de Sorj Chalandon (Grasset), "fabriqué et archaïque". Jérôme Dupuis a été déçu par Mercy, Mary, Patty, de Lola Lafon (Actes Sud), "un kidnapping littéraire raté à force d'afféteries inutiles". Et Eric Libiot a trouvé que La chambre des époux, d'Eric Reinhardt (Gallimard), était "Un roman répétitif, égotique et vain." Pan!
Dire que j'ai beaucoup aimé le premier et que je me réjouissais de lire les deux autres...
En tête de gondole dans le même hebdomadaire, Femme à la mobylette, d'Eric Seigle (Flammarion), Sucre noir, de Miguel Bonnefoy (Rivages), Frappe-toi le cœur, d'Amélie Nothomb (Albin Michel), La disparition de Josef Mengele, d'Olivier Guez (Grasset), et Comment vivre en héros, de Fabrice Humbert (Gallimard).
Je n'en ai encore lu qu'un (ceux qui me connaissent bien devineront aisément lequel), je l'ai trouvé assez moyen, et j'espère beaucoup des autres.
Pour être complet avant de quitter L'Express, j'ajoute qu'un grand article y est consacré à un ensemble de trois romans liés par leur sujet, l'Algérie française: L'art de perdre, d'Alice Zeniter (Flammarion), Dans l'épaisseur de la chair, de Jean-Marie Blas de Roblès (Zulma), et Un loup pour l'homme, de Brigitte Giraud (Flammarion, bien servi cette semaine).
Aux Inrockuptibles, on a de la suite dans les idées puisque s'y reproduit chaque année une séquence identique: après une couverture "sexe" qui nous dure plusieurs semaines, parce que cela été fatigant de la choisir et qu'il vaut mlieux ensuite partir en congés, la rentrée littéraire est ponctuée d'une couverture "livres". En 2017, c'est Alan Moore, tout seul, pour son volumineux Jérusalem (Inculte), traduit par Claro sans qui nous n'aurions de la littérature anglo-saxonne qu'une très imparfaite image. Sur huit pages, "Le magicien de Northampton" (c'est le titre de l'article) se livre à Nelly Kaprièlan. Et ça commence par un sonore "Fuck!"
Puis vient un choix de quarante romans, pas moins, dans lequel il y aura à puiser, douze extraits des meilleurs livres de l'automne - parmi lesquels, ah! celui de Sorj Chalandon et, hé! hé! celui d'Eric Reinhardt que Lire avait aussi retenu parmi les romans de la rentrée présentés par extraits dans son numéro de juillet-août. Je ne me moque pas de L'Express, je rappelle seulement: les goûts et les couleurs, vous savez...
Dans le cahier critique des Inrockuptibles, le choix est celui des premiers romans: Fief, de David Lopez (Seuil), Le presbytère, d'Ariane Monnier (Lattès), Ostwald, de Thomas Flahaut (L'Olivier), Les fils conducteurs, de Guillaume Poix (Verticales), Demain sans toi, de Baird Harper (Grasset), et Les talons rouges, d'Antoine de Baecque (Stock).
A lire encore, tout ça (et bien d'autres), au contraire du premier roman d'Olivier El Khoury (Surface de réparation, Noir sur blanc). Je le cite un peu parce que je bavardais avec lui hier après-midi (mais vous devrez attendre avant de lire ce que donnera cet entretien), beaucoup parce qu'il est, avec David Lopez déjà cité, l'invité de La Grande table d'été sur France Culture (à 12h45 ou, ensuite, en podcast). J'écouterai ça...