La Renaissance, avant d'être un phénomène de culture, c'est d'abord la naissance simultanée du capitalisme et du colonialisme. L'un et l'autre s'impliquent, et ils se traduisent, sur le plan de la culture, par l'exaltation de la volonté de puissance de l'individu, de plus en plus indifférent au divin, et faisant de la science, séparée de la sagesse, la servante des appétits de domination sur la nature et sur les hommes.
C'est alors qu'en Occident a pris naissance un nouveau culte des idoles dorées de la puissance. L'aventure coloniale, condition nécessaire de l'accumulation primitive du capital, a commencé avec le génocide indien : en Amérique, des aventuriers possédés par la fièvre de l'or massacrent les hommes et détruisent les civilisations de tout un continent.
Elle a continué avec le plus atroce attentat contre l'unité humaine : la traite des nègres d'Afrique. Dix millions d'esclaves sont déportés en Amérique pour remplacer le travail forcé des Indiens décimés. Dix tués pour un captif. Cent millions d'hommes détruits. Enfin, en imposant sa domination coloniale à l'Asie elle a étouffé, pour un siècle, le développement de ses cultures.
Nous mesurerons, sur trois exemples seulement, l'ampleur de ces occasions perdues de l'histoire, de ces dimensions perdues de l'homme.
Roger Garaudy
Comment l’homme devint humain, pages 250-251