Surveiller les stades du sommeil sans capteurs reliés au corps, c'est le dispositif proposé par cette équipe du Massachusetts Institute of Technology qui utilise un algorithme avancé d'intelligence artificielle pour analyser les signaux radio (sans fil) diffusés autour du sujet et les associer aux différents stades du sommeil (léger, profond ou paradoxal). Présenté à l'International Conference on Machine Learning 2017, la technique pourrait permettre une surveillance non intrusive et à la maison des patients atteints de troubles du sommeil.
Rappelons les principaux stades du sommeil, le sommeil lent léger qui correspond globalement à la période d'endormissement, le sommeil lent profond durant lequel l'activité cérébrale ralentit et le cerveau devient plus insensible aux stimuli extérieurs, le sommeil paradoxal durant lequel le réveil du sujet est difficile, son tonus musculaire au plus faible et son activité cérébrale ralentie à un niveau similaire à celui du stade d'endormissement.
Pour faciliter le diagnostic et l'étude des troubles du sommeil, l'équipe du MIT et du Massachusetts General Hospital a conçu une nouvelle façon de surveiller les stades du sommeil sans capteurs attachés au corps. Leur dispositif utilise un algorithme avancé d'intelligence artificielle pour analyser les signaux radio autour de la personne et faire correspondre ces mesures aux différents stades. L'équipe avait déjà développé des capteurs radio permettant de mesurer à distance des signes et des comportements vitaux pouvant constituer des indicateurs de santé. Ces capteurs se composent d'un périphérique sans fil, à peu près de la taille d'un ordinateur portable, qui émet des signaux radio basse fréquence (RF). Le principe est que tout mouvement du corps, même très léger, modifie la fréquence des ondes réfléchies. L'analyse de ces ondes peut ainsi fournir une mesure de signes vitaux tels que le pouls et le taux de respiration.
Une box Wi-Fi intelligente à la maison permet ainsi d'analyser la fréquence des ondes réfléchies et traduire ces données en changements physiologiques. L'approche a ensuite permis de développer WiGait (2) un capteur qui mesure la vitesse de marche en utilisant des signaux sans fil, ce qui va aider les médecins à prédire le déclin cognitif, les chutes, certaines maladies cardiaques ou pulmonaires ou d'autres problèmes de santé. Puis une mesure des émotions (3).
Enfin, est née l'idée d'une approche similaire pour surveiller le sommeil, ce qui est possible en laboratoire de sommeil par polysomnographie mais via l'intermédiaire de multiples " attaches ", des capteurs placés sur le cuir chevelu, les tempes, le menton, d'autres sur le thorax et les jambes, des ceintures thoracique et abdominale et un capteur autour de l'index ...
Une étude de son sommeil sans fil et dans son lit : l'objectif, on l'aura compris est de pouvoir étudier le sommeil dans les mêmes conditions qu'à la maison. " Les capteurs de santé disparaissent à l'arrière-plan et capturent des signaux physiologiques et des mesures importantes de santé, sans demander à l'utilisateur de modifier son comportement de quelque manière que ce soit ", résument les auteurs.
Une télédétection ultrasensible : on l'aura compris ; tout repose sur la sensibilité de la télédétection et de la traduction de mesures physiologiques, dont celles du pouls, de la fréquence respiratoire et du mouvement durant le sommeil. Les progrès récents de l'intelligence artificielle ont permis de développer des algorithmes informatiques ou " réseaux neuraux profonds " capable d'extraire et d'analyser des ensembles de données complexes, tels que ces signaux radio obtenus à partir du capteur des chercheurs. Cependant, ces signaux comportent aussi " un bruit de fond ", soit une grande quantité d'informations qui ne dépendent pas du sommeil et peuvent être source de confusion pour les algorithmes existants. Tout le défi de l'équipe du MIT était donc de pouvoir éliminer l'information non pertinente : " La nouveauté réside dans la préservation des signaux de sommeil tout en supprimant tout le reste ".
La preuve de concept : un test mené avec 25 volontaires permet de constater une précision de 80% de la nouvelle technique, une précision d'ailleurs comparable à celle des examens polysomnographiques standards.
L'objectif est de pouvoir utiliser la technologie pour étudier comment la maladie de Parkinson affecte le sommeil, puis ensuite mieux comprendre les troubles du sommeil associés à la maladie d'Alzheimer, les crises épileptiques qui se produisent durant le sommeil, ainsi que les troubles " plus classiques " comme l'insomnie et l'apnée du sommeil.