Friends from College est une nouvelle comédie dont les huit épisodes ont été mis sur le site de Netflix le 14 juillet. Ces amis, on en compte six : Ethan (Keegan-Michael Key), un écrivain, Lisa (Cobie Smulders), sa femme et avocate, Sam (Annie Parisse), une architecte, Max (Fred Savage), un agent littéraire, Nick (Nat Faxon), un dandy avant l’âge et Marianne (Jae Suh Park), une instructrice de yoga. Se rencontrant partiellement depuis la fin de leurs études, par un concours de circonstances ils se retrouvent tous à vivre à New York et par conséquent, se voir plus souvent… ce qui n’est pas nécessairement une bonne nouvelle. De son côté I’m Sorry est une nouveauté de dix épisodes de TruTV diffusée plus ou moins aux mêmes dates et qui met en scène Andrea (Andrea Savage), une humoriste. Si lors de représentations les gens adorent son franc-parler, il n’en est pas de même dans sa vie de tous les jours où la plupart du temps, elle déclenche malgré elle des malentendus qui dégénèrent au cours des épisodes. Les deux fictions y allant parfois dans l’extrême pour nous faire rire, la nouveauté de Netflix est beaucoup trop désordonnée à plusieurs niveaux pour mériter notre attention outre mesure. Quant à celle de TruTV, les thèmes ou dialogues irrévérencieux sont à la base même d’un humour que l’on ne retrouverait jamais sur un network et l’ensemble se tient étonnamment bien.
Friends from College: une amitié insondable
Avant de sortir avec Lisa, Ethan entretenait une relation sexuelle avec Sam qui, bien que devenue épisodique, ne s’est jamais arrêtée après leurs mariages respectifs. Évidemment, le fait qu’au début de la série ils vivent désormais dans la même ville vient changer singulièrement la donne et compliquer leur relation. Au point de vue du travail aussi l’ambiance n’est pas au beau fixe. En plus du couple qui n’arrive pas à avoir d’enfants, on a Lisa qui découvre que la nouvelle firme où elle a été engagée est peuplée de Cro-Magnons tous plus stupides les uns que les autres. De son côté, bien qu’Ethan soit un romancier chouchou des critiques, ce qu’il écrit ne se vend pas. Max a beau faire tout ce qu’il peut pour le convaincre de se mettre à rédiger des livres pour adolescents, encore lui faudrait-il de l’inspiration.
Mis à part la relation autant amicale que professionnelle entre ces deux hommes, il nous est difficile de croire qu’eux et les quatre autres protagonistes aient pu être copains à la fac comme le titre de la nouveauté de Netflix le mentionne. En effet, après trois épisodes on se demande toujours quels sont les points communs qui les ont unis il y a plus de vingt ans et qui justifient qu’ils aient envie de se rencontrer encore de nos jours. C’est que les autres y vont de médisances dès que l’un d’eux a le dos tourné ou alors ils mentent tout simplement à propos de leurs carrières ou de leur vie amoureuse pour rendre les autres jaloux. Le scénario est non seulement incohérent à cet égard, mais se révèle en plus extrêmement inégal quand vient le temps de nous brosser un portrait des différents personnages. Par exemple, on couvre en long et en large la relation extra-conjugale entre Ethan et Sam, mais on ne sait toujours quasiment rien de Nick et Marianne. C’est tout juste si le premier a prononcé plus de cinq phrases en trois épisodes tandis que la seconde reste une énigme du point de vue professionnel. On l’a vu enseigner le yoga et créer des pièces de théâtre expérimental, mais apparemment elle couche aussi pour de l’argent lorsque l’occasion se présente…
Et comme toutes les comédies en manque d’inspiration, Friends from College en fait trop dans sa tentative de nous faire rire… sans succès. Les collègues de Lisa qui débitent des puérilités, le restaurant « vampirique » où Ethan et Sam se donnent rendez-vous incognito, Shawna (Kate McKinnon) à moitié intoxiquée qui offre son mentorat à l’auteur en manque d’inspiration : rien de tout cela n’est crédible.
I’m Sorry : l’apologie de la spontanéité
Bien qu’Andrea soit humoriste de profession, jamais on ne la voit sur scène. Par contre, dans son quotidien elle a la même verve et n’est pas du genre à se formaliser de quoi que ce soit. Par exemple, dans le pilote, sa fillette Olivia (Olive Petrucci) est invitée pour l’anniversaire d’une copine et Andrea et son petit ami Mike (Tom Everett Smith) doivent être parmi les seuls à savoir que la mère de la fêtée a déjà joué dans des films pornos, se « spécialisant » dans les relations anales. L’embarras monte d’un cran quand plus tard, toute l’assistance reçoit l’un des extraits de ses vidéos et qu’on est persuadé que c’est l’humoriste qui a orchestré cette fuite. Au deuxième épisode, la protagoniste est encore une fois mal à l’aise lorsqu’Olive se met à proférer des propos racistes à l’encontre d’une autre fillette de la garderie… laquelle est invitée, elle et sa mère à souper. Sinon, la semaine suivante, elle arrange un rendez-vous entre son meilleur ami Kyle (Jason Mantzoukas) et miss Shelly (Lyndon Smith), l’institutrice d’Olive qui a des goûts spéciaux au lit…
Après Nobodies sur TV Land et Crashing sur HBO, I’m Sorry est la troisième sitcom de 2018 à avoir un personnage principal issu de la scène et dont la frontière entre la réalité et la fiction demeure floue, notamment avec l’humoriste qui y conserve son véritable prénom. Mais là où la nouveauté de TruTV se démarque de ses contemporaines (auxquelles on peut ajouter Dice (Showtime), The Comedians (FX) ou Nightcap (Pop) pour ne nommer que celles-là), c’est qu’elle n’effectue pas une critique du milieu du showbizz, mais seulement de la vie en général. Ainsi, la protagoniste réussit à nous divertir et surtout provoquer en nous quelques rires avec des imbroglios qu’elle crée par fois elle-même. Si on peut déplorer que les malentendus tournent un peu trop souvent autour de pratiques sexuelles douteuses, ce que l’on retient surtout c’est l’excellent casting, à commencer par Andrea Savage, moins connue d’un auditoire international. Sans filtre, mais respectueuse, gaffeuse, mais pleines de bonnes intentions, on s’attache rapidement à elle. Enfin, c’est l’évidente chimie avec ses partenaires de jeu, Tom Everett Scott et Jason Mantzoukas en particulier, qui rend la comédie agréable à regarder, sans pour autant nous fidéliser à tout prix à une saison entière.
Le premier épisode de I’m Sorry a attiré en direct 311 000 téléspectateurs avec un taux de 0,16 chez les 18-49 ans et trois semaines plus tard, ce chiffre baissait à 259 000 (0,13). En même temps, la chaîne avec ses multiples téléréalités est loin d’être un incontournable des fictions pour les Américains. Quant à Friends from College, à la mi-juillet, le responsable des programmes de Netflix Ted Sarandos annonçait en conférence avoir l’intention d’être plus tranchant avec ses fictions qui marchent le moins bien. C’est à voir si la parole suivra les actes puisque rien ne justifie le renouvellement de cette comédie.
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