Linus se réveille dans un bunker. Seul. L'adolescent comprend qu'il a été kidnappé. Une cuisine, une salle de bain, six chambres. Peu à peu, de nouvelles personnes arrivent, capturées, comme lui. Peu à peu, la communauté s'organise, se hiérarchise. Seul moyen pour sortir : un ascenseur contrôlé à distance, qui ne s'actionne que pour amener les nouveaux arrivants, des vivres, ou d'autres surprises, comme des rappels de la cruauté du ravisseur.
Le récit de Captifs, c'est le journal que tient Linus, tout au long de sa captivité. Trouvé dans le bunker, le carnet est son journal de bord. D'abord un témoignage de sa situation horrible, il deviendra un exutoire chaque fois que le désespoir l'envahira. Il sera aussi un journal intime pour raconter sa vie d'avant, faire des suppositions, et établir des plans d'évasion. Contrecoup de taille, en étant le journal d'un adolescent, Captifs devient un roman young adult et beaucoup de péripéties semblent minimisées. Tout passe par son prisme, et cela n'aide pas non plus à donner de l'épaisseur aux autres personnages.
Le ravisseur est invisible et semble tout contrôler, n'hésitant pas à punir à distance toute action inconsidérée des prisonniers. Mais son absence de communication directe rend fou : impossible alors de savoir pourquoi chacun est retenu ici. Quand chaque geste semble surveillé, la paranoïa s'installe. Linus, lui-même, commencera à être méfiant et à en dévoiler le moins possible dans son carnet.
Avec un tel format, l'auteur s'en sort à merveille. Kevin Brooks multiplie les effets de style propice au journal de bord, allant même jusqu'à rappeler que les dates qui le chapitrent ne sont peut-être pas fiables - elles ne sont qu'une déduction de Linus. Il atteint parfois ses limites lorsque son héros délire - difficile d'imaginer l'adolescent divaguant avec son carnet et son stylo à la main - ou lors des péripéties puisque Linus commencera alors chaque chapitre par une formule rompant avec le suspense. " Il s'est passé quelque chose aujourd'hui ". Heureusement, le final est glaçant et termine le roman avec brio.
Dieu sait ce qui est arrivé depuis. Combien de jours j'ai perdus ? Ou gagnés ? Pour ce que j'en sais, aujourd'hui pourrait très bien être un mercredi, ou un lundi, ou un jeudi. Mais, comme je le disais, qu'est-ce que ça peut faire ? Lundi, mardi, mercredi... Ce ne sont que des mots, sans aucun sens réel. Ici, dans le bunker, c'est ici dans le bunker. Un jour est un jour. L'heure c'est maintenant. Il n'y a pas à chercher plus loin.