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Marie Laberge et «Ceux qui restent»

Par Pmalgachie @pmalgachie
Marie Laberge «Ceux restent» La romancière québécoise Marie Laberge, qui travaille aussi beaucoup pour le théâtre, ne déteste pas les sujets graves. Mais jamais traités de manière théorique. Elle prend ses personnages comme ils sont, avec aussi leur manière de parler parfois surprenante quand on ne pratique pas le vocabulaire local. Et leur dessine des trajectoires complexes. Le suicide est un choix personnel. Il ne tient pas toujours compte des conséquences sur les proches, Ceuxqui restent, comme les appelle Marie Laberge en titre de son nouveau roman. Sylvain s’est tué en 2000. Mélanie-Lyne, sa veuve, tente de protéger leur fils, Stéphane, qui échappe de plus en plus à son influence. Charlène, qui était la maîtresse de Sylvain, se souvient des moments partagés. Vincent, le père du disparu, regarde décliner son épouse Muguette, dont il est séparé, et devient un habitué du bar où officie Charlène. Ceux qui restent, donc, suivent les trajectoires choisies par la romancière. Elle leur fournit de multiples occasions de rencontres et de méprises, ainsi que les armes pour faire, tant bien que mal, leur deuil. De retour sous dans une maison d’édition française après avoir déjà publié quelques romans à Paris il y a une dizaine d’années, l’écrivaine n’a fait aucune concession linguistique au public non québécois. On lit par exemple, à la fin du premier paragraphe : « Faut-tu être tarte ! Faut-tu vouloir ! » Le sens de certaines expressions utilisées par Charlène nous échappe. Cela méritait une explication, avant toute autre question. Cela vous échappe peut-être dans le sens précis des termes, mais pas en ce qui concerne leur force émotive. Les niveaux de langage sont importants. Pour un Québécois moyen, lire Charlène, c’est comme recevoir une insulte. Les jeunes sont plus enclins à comprendre ce type de violence verbale. Mais, si on saisit Charlène dans sa charge verbale, on comprend quelque chose d’important chez elle. Vous aviez décidé d’écrire un roman autour du suicide ? Surtout sur ceux qui restent. C’est le suicide qui déclenche l’intérêt que j’ai pour ces gens. Quand un coup de tonnerre pareil arrive dans une vie, l’orage ne laisse pas le paysage intact. Quand on réussit à absorber le choc, le moment présent et la vie gagnent en intensité. Les relations entre vos personnages font un sac de nœuds assez complexe… C’est vrai, je suis d’accord. Ce n’est pas ce que je voulais. Je ne pars jamais avec un plan. Au début, j’ai un point très fort, avec des personnages assez nets dans mon cœur, et je les laisse aller, je m’y abandonne. Je ne les prends pas en otages, c’est eux qui me ravissent, dans tous les sens du terme : ils me prennent en otage et ils me font aussi plaisir. Est-ce que l’écriture pour le théâtre, qu’on connaît en Europe où plusieurs de vos pièces ont été montées, influence vos romans ? Sûrement, et je pense que c’est dans ce roman que cela apparaît le plus nettement. Le fait d’avoir trois personnages qui s’adressent eux-mêmes au lecteur, avec des niveaux de langage si précis, vient probablement de l’oralité du théâtre qui fait qu’un personnage s’exprime dans son choix de mots et dans son rythme. Oui, c’est un héritage du théâtre… De la même manière, comme au théâtre, on est dans le présent, dans ce qui se passe, dans ce qui se dit, et que le lecteur en tire ses conclusions. Le roman est paru au Québec un an avant son édition française. Comment réagissent les lecteurs ?
Autant il y a de façons de faire son deuil, autant le roman a touché les lecteurs de façons différentes. J’ai de très belles réactions de lecteurs qui m’ont approché avec une immense confiance et cela me fait un bien fou en même temps que cela crée beaucoup d’émotion.

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