Partager la publication "[Critique] AFTERMATH"
Titre original : Aftermath
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Elliott Lester
Distribution : Arnold Schwarzenegger, Maggie Grace, Scoot McNairy, Kevin Zegers, Glenn Morshower, Hannah Ware, Mariana Klaveno…
Genre : Drame
Date de sortie : 18 juillet (DTV)
Le Pitch :
Alors qu’il se rend à l’aéroport pour accueillir sa femme et sa fille, un homme apprend que l’avion dans lequel elles se trouvaient s’est crashé à la suite d’une erreur d’un contrôleur aérien. Dévasté, il cherche rapidement à en savoir plus et se met en tête de retrouver l’homme qu’il estime responsable de la tragédie…
La Critique d’Aftermath :
Quand le moment fut venu de faire son retour sur les plateaux de cinéma, à la suite de son double mandat en tant que Gouverneur de Californie, Arnold Schwarzenegger choisit de rassurer ses fans et de revenir dans l’action. Dans le genre qui avait fait de lui une superstar. Il tourna ainsi Le Dernier Rempart, Sabotage, puis les Expendables et Évasion avec son pote Sylvester Stallone. Des longs-métrages connectés avec ceux que l’acteur portait dans les années 80 et 90, qui n’ont pourtant pas remporté un franc succès, l’obligeant peut-être à étudier des options qui pourraient lui permettre de non seulement prouver qu’il en avait encore sous la pédale mais aussi qu’il pouvait faire autre chose que de faire exploser des trucs et tabasser des mecs à la chaîne. Arnold qui, quoi qu’il en soit, ne s’est jamais laissé arrêter par les mauvaises critiques ou par le box office. C’est ainsi qu’il est revenu au Terminator là encore sans vraiment convaincre la majorité, sans pour autant que l »échec du film lui soit imputé, avant d’embrasser le drame pur et dur avec Maggie, un film de zombies intimiste centré sur la détresse d’un père de famille. À presque 70 ans, Arnold envisage son avenir au cinéma à l’aune de personnages plus pertinents au vu de son âge et prend des risques comme un jeune premier. Avec Maggie donc, qui lui donna l’occasion de tabler sur un registre assez nouveau pour lui , mais aussi avec Aftermath, son nouveau long-métrage, qui confirme le virage pris depuis quelques années ainsi que ce désir de remiser l’action pure et dure pour donner dans quelque chose de plus retenu et de plus viscéral à n’en pas douter…
Les rainures du Chêne
Néanmoins, la promo d’Aftermath mise avant tout sur la notion de vengeance et semble le positionner dans le sillage de films de justiciers dans le goût de Taken. Autant le dire tout de suite : Aftermath n’évolue pas du tout dans le même registre. Le voir en s’attendant à assister à la revanche d’un homme meurtri porté sur les exécutions sommaires risquerait d’aller de pair avec une amère déception, car le film n’a absolument rien à voir avec cela. Non, car Aftermath est une tragédie très intime. Un drame lourd, qui s’attarde sur les non-dits, sur les yeux embués de larmes et sur la notion de survie. Sur la résilience d’un homme ordinaire confronté à quelque chose de si terrible que dès lors, sa propre existence vacille sur ses fondations.
Au centre donc, Schwarzie. Le chêne autrichien qui se frotte à quelque chose de très délicat, lui qui a toujours assaisonné le drame avec l’action, privilégiant les réactions brutales aux larmes. Ici c’est différent car ce personnage de père de famille meurtri ne lui laisse aucune alternative. Arnold doit composer avec le chagrin qui va de pair avec le rôle et incarner une douleur abyssale, avant de donner du corps à l’évolution du père de famille, quand celui-ci réclame justice, toujours dans la retenue, dans la mesure, en équilibre constant.
Alors qu’Arnold aurait pu faire comme Steven Seagal et continuer à enfoncer le clou, apparaissant (quelques minutes seulement parfois) dans des trucs indigents qui tablent mollement sur la légende de leur acteur principal, sans chercher quoi que ce soit de ne serait-ce qu’un peu flamboyant. Il aurait pu continuer jusqu’au moment où même les effets-spéciaux n’auraient pas pu rattraper son âge. Mais non, car comme le prouve Aftermath, Arnold se met en danger. Il sort de sa zone de confort et prouve de la plus vibrante et touchante des manières de quel bois il est fait. Si il est fort probable qu’on le retrouvera prochainement dans des films d’action, où sa carrure et son charisme feront toujours leur effet, il faut lui reconnaître un goût du risque et une audace parfaitement raccord avec sa personnalité. Avec une modestie et une simplicité qui sied parfaitement avec les intentions du projet, Schwarzenegger livre une performance très émouvante, portant le film sur ses larges épaules du début à la fin, y compris quand celui-ci suit les sinuosités d’un scénario un peu bancal par moments. Il est le roc autour duquel gravitent tous les autres personnages et du même coup celui qui incarne les enjeux et toute la dramaturgie du récit. Comme dans Maggie, les apparats de l’horreur et du fantastique en moins, Schwarzie se met à nu et avance dignement, parvenant au bout du compte à prend à revers les attentes pour proposer quelque chose de profond et de véritablement intense.
Il convient aussi de souligner la performance de Scoot McNairy, qui interprète le contrôleur aérien mis en cause, et sur lequel l’intrigue s’attarde longuement, alors que s’abat sur lui le jugement impitoyable d’une opinion publique sans pitié. Au début d’ailleurs, Aftermath est clairement scindé en deux. D’un côté il s’attache au deuil du personnage de Schwarzenegger et de l’autre à la culpabilité qui ronge celui de McNairy, établissant un parallèle très intéressant, avant d’orchestrer la confrontation.
Après les larmes…
Film indépendant tourné avec un budget très modeste, Aftermath sort directement en vidéo en France. Un choix de distribution regrettable mais compréhensible tant ce projet ne surfe pas sur une quelconque tendance pour tenter de flatter les fans d’Arnold ou ceux qui seraient susceptibles de le voir pour y trouver ce même parfum présent dans nombre de productions plus ou moins bourrines des 90’s. Comme dit plus haut, Aftermath est un film maladroit. Quand le personnage principal est en proie à la folie par exemple, le script a bien du mal à négocier les virages sans effectuer quelques sorties de route. Rien de bien grave mais quand même. Idem quand il s’agit d’entretenir un rythme un peu en dents de scie. Aftermath n’a rien de simple et parfois, il se prend un peu les pieds dans le tapis. Ce qu’il conserve tout du long néanmoins, c’est sa sincérité. Là est sa force. Il ne cède pas franchement à l’excès et avance bille en tête sans se départir d’une honnêteté qui fait notamment des merveilles à la fin. Une conclusion déchirante, durant laquelle le réalisateur parvient à cristalliser ses intentions, toujours épaulé par la conviction de son acteur principal, qui pour sa part, vous l’avez compris, ne lâche jamais rien.
En Bref…
Arnold Schwarzenegger prend un risque qui s’avère payant, en incarnant un père de famille meurtri, dans ce film modeste et sincère. Aftermath n’est pas parfait. Il fait montre d’une bonne volonté à toute épreuve mais n’évite pas les maladresses. Cela dit, il peut compter sur la présence d’Arnold, qui parvient à le porter à bout de bras, lui permettant de raconter avec une belle authenticité l’histoire difficile d’un deuil impossible.
@ Gilles Rolland