Critique d’Au bout du monde, de Olivier Rolin, vu le 15 juillet 2017 au Théâtre du Chêne Noir
Avec Daniel Mesguich, Sterren Guirriec, et Alexis Consolato, dans une mise en scène de Daniel Mesguich
Il y a des choses qu’on n’oublie pas au théâtre. Des moments suspendus, totalement éphémères, qui vous marquent et vous laissent une impression pleine. Peut-être qu’on se met à idéaliser ce moment qui nous avait tant marqué. C’est ce que je cherche à savoir en retournant voir jouer Sterren Guirriec, que j’avais découverte déjà aux côtés de Daniel Mesguich dans sa version de Trahisons il y a 3 ans, dans le même théâtre. J’ai le souvenir d’une actrice lumineuse et dont la présence éclipsait tout le reste du monde. J’étais donc ravie de pouvoir à nouveau tenter l’expérience dans la nouvelle proposition de celui qui semble être son gourrou, Daniel Mesguich.
L’idée était belle, poétique, compréhensible, encouragée. Elle mettait en scène deux inconnus, un voyageur et la serveuse du café dans lequel il s’arrête, que tout semble opposer et qui vont apprendre à faire connaissance, chacun tentant de faire un pas dans l’univers de l’autre pour finalement parvenir à rêver tous les deux de partir au bout du monde. Entre eux, on le sent à tout moment, intervient le commun, le monde des idées sans pensée, de la conversation sans intelligence, marqué ici par un poste de télévision qui s’allume à plusieurs reprises durant le spectacle.
J’aimais cette situation. Mais j’ai éprouvé dès le début une gêne face à cette actrice qui ne correspondait plus au souvenir que j’avais. La dure réalité du temps qui passe s’offrait ici dans toute sa cruauté avait marqué de son fer irréversible les traits de la belle jeune femme de ma mémoire. Je retrouvais sa voix si particulière, belle, mémorable, puissante. Mais quelque chose avait changé, et je dois admettre que cela m’a profondément troublée.
Je ne suis pas rentrée dans cette histoire pleine de poésie qui nous est proposée au Chêne Noir. J’y vois plusieurs explications : d’abord, il faut préciser que ce spectacle passe après Sopro de Tiago Rodrigues que j’avais vu la veille au soir, et que je crois que nul auteur ne peux tenter la comparaison en matière de poésie lorsque l’auteur portugais est dans les parages. Mais au-delà de ça, j’ai trouvé le spectacle lent, la scénographie maniérée, un peu pompeuse, à la manière du texte. Je n’ai pas réussi à rentrer dans cette évasion de l’esprit proposée par ces deux personnages.
Un peu lent, un peu long, un peu grandiloquent, un peu ennuyeux. Un peu pas nécessaire.