C'est sur qu'avec un titre pareil, Mal parti, rien ne tournera rond. Pourtant il s'accroche et nous avec.
Malgré ses défauts, et son caractère tantôt touchant, tantôt franchement odieux on se dit qu'un jour quelque chose de bon adviendra, même s'il a eu toute l'enfance, longue, pour se faire à la défaite (p. 24). Et le lecteur continue d'espérer.
On croit un moment qu'après un début de vie chaotique la trajectoire est redressée. On refuse de suivre le père qui a assimilé le fils à un désastre (p. 42) et pour qui la réussite au certificat d'études ne remet pas la prophétie en cause. Ce père, il ne l'épatera jamais.
Il a pourtant un vrai métier et il peut légitimement croire en une réussite. Nous aussi. Mais l'ascenseur social se grippe à cause de ce qui devient un accident de parcours, en toute catastrophe.
Monique Jouvancy n'épargne ni les désirs, ni les défaites à son héros très ordinaire, en ce sens que cet homme a pu être un camarade d'école, un de nos voisins, un collègue peut-être. On a tous rencontré des personnes qui sont "mal parties". Celui-là est emblématique du genre, lui qui n'existe que derrière le pronom il, gouverné par des parents qui sont indéfinis avec l'emploi du on, car ils sont eux aussi anonymes.
L'écriture est prenante. Nous sommes très vite immergés dans la vie provinciale de la seconde moitié du XX°siècle, il n'y a pas si longtemps ... Elle nous met la tête sous l'eau mais on ne quitte pas la piscine. Il faut croire qu'on aura le souffle pour gagner l'autre rive.
Ce roman là est conçu pour être lu d'une traite. Allez-y, plongez !
Mal parti de Monique Jouvancy chez Buchet Chastel, en librairie depuis le 2 février 2017