Critique d’On ne voyait que le bonheur, d’après Grégoire Delacourt, vu le 15 juillet 2017 au Théâtre Actuel
Avec Grégori Baquet, Murielle Huet Des Aunay, dans une mise en scène de Grégori Baquet
Chaque année dans le OFF, c’est la même chose : je DOIS voir le nouveau spectacle de Grégori Baquet. L’artiste, que je suis depuis plus de 7 ans maintenant et que j’ai découvert avant la création de ce blog, fait partie des incontournables du Festival. Je ne crois pas avoir été une seule fois déçue par les créations qu’il y présente, et c’est également une manière d’attendre son spectacle parisien – n’oubliez pas qu’il sera Hamlet la saison prochaine au Théâtre 14 ! J’en profite également pour faire ici de la pub pour son deuxième spectacle, Adieu Monsieur Haffmann, présenté au Théâtre Actuel à 20h40. Une valeur sûre.
L’histoire rappelle un peu celle de la chanson de BigFlo et Oli – avant de dénigrer, il faut écouter – Monsieur Tout L’monde. On rencontre Antoine, un père de famille qui se décrit comme un lâche depuis toujours, et qui nous raconte la perte de son travail suite à son seul épisode de compassion en plus de 20 ans de métier. Cet échec entraîne pour lui une remise en question de tout le monde, et le conduit à vouloir mettre fin à ses jours ainsi qu’à celle de ses enfants. Un soir, il tire dans sa fille mais la rate et ne parvient qu’à lui casser la mâchoire. Le spectacle met en parallèle la convalescence de Joséphine, sa fille, et celle d’Antoine : comment vont-ils se reconstruire, et, finalement, se retrouver.
Ma première réaction au sortir du spectacle a été : qui est cet auteur américain ? J’avais fait aveuglément confiance à la distribution sans m’attarder sur le pitch de la pièce, et cette abondance de bons sentiments, un peu larmoyants, sonnait à mon sens bien américain. Erreur ici, il s’agit d’un auteur bien français. Ce qui me gêne fondamentalement dans cette écriture, c’est qu’on sent à quel point c’est pensé et c’est réfléchi de manière à tirer la larme, et que ça ne vient pas des tripes ; ça ressemble vraiment à une recette toute faite pour émouvoir, et sentir cela m’empêche d’apprécier pleinement ce que je vois. Cette ode à la vie est trop insistante pour respirer la véracité.
Pourtant, le spectacle commençait très bien. La première scène, dansée, a produit un grand effet sur moi et j’ai trouvé ça visuellement très réussi, très poétique, très beau. De manière générale, la scénographie est plutôt réussie, avec de belles idées. Si l’écriture avait été à la hauteur du rendu visuel du spectacle, j’aurais adhéré sans hésiter. Il faut aussi reconnaître que les acteurs sont excellents : Grégori Baquet est l’humanité faite homme, ce qui rend ce personnage attachant alors qu’il aurait pu être détestable – il sait nous le rendre commun, entraînant fatalement une comparaison avec nous même face à cet homme dépassé par la vie, totalement perdu. A ses côtés, Murielle Huet Des Aunay, que je découvrais, n’est pas en reste, et enchaîne les personnages avec aisance dans des transformations physiques totales. A eux deux, ils forment un joli duo.
De ce spectacle, il me restera de beaux souvenirs visuels, mais je crains que le texte ne reste pas longtemps en moi. ♥