Titre : Sept cannibales
Scénariste : Sylvain Runberg
Dessinateur : Tomeu Morey
Parution : Octobre 2016
Sept est une série au concept à la fois simple et original. En effet, les auteurs ont une liberté totale sur leur scénario à l’exception d’une contrainte : l’histoire doit être centrée autour de sept personnages principaux. J’ai eu l’occasion de lire un certain nombre de tomes tels que Sept voleurs, Sept missionnaires, Sept yakuzas, Sept naufragés ou Sept pistoleros, Les auteurs variant souvent d’un album à l’autre, il en découle logiquement une inégalité d’attrait et de qualité entre les ouvrages. Le dernier que je me suis procuré est Sept cannibales. C’est un article élogieux et intrigant à son égard qui a éveillé ma curiosité.
Des dégénérés à l’égo surdimensionné
Cet épisode est le fruit du travail de Sylvain Runberg pour le scénario et Tirso pour le dessin. Les deux auteurs m’étaient jusqu’alors inconnus. Je dois bien avouer que le titre est particulièrement accrocheur. « Cannibale » est un terme qui ne peut pas laisser indifférent. Il génère naturellement de la peur, de l’angoisse, du dégoût tout en attisant une forme de curiosité. Le sous-titre « Sept compagnons repoussent les limites du mal » accentue ses sentiments. L’intrigue allait-elle être à la hauteur des attentes générées la couverture ?
La quatrième de couverture pose les enjeux avec les mots suivants : « Ils sont sept. Riches… Influents… L’élite. Avides de sensations fortes, ils s’imaginent mâles dominants, se jouant des valeurs hypocrites d’une société qui les adule. Ne vivent-ils pas dans un monde où la loi du plus fort s’impose ouvertement ? Sept prédateurs, qui assouvissent leurs pulsions lors de gigantesques fêtes privées. Mais le rituel va être perturbé. Car cette fois-ci, leur nouvelle proie n’entend pas se laisser mener à l’abattoir… »
Le projet apparaissait ambitieux. En effet, à travers ce groupe, les auteurs évoquaient donc une critique sociétale. Cet aspect était à mes yeux un atout potentiel indéniable de l’ensemble. Hélas, il n’est vraiment pas exploité par les auteurs. Les sept amis se contentent d’être un groupe de dégénérés à l’égo surdimensionné. A aucun moment, on ne prend de recul sur les causes qui les ont amenés à devenir ce qu’ils sont. J’ai vraiment le sentiment que ce comportement est en eux depuis toujours et que les années leur ont juste permis de mettre en place leur jeu machiavélique.
Néanmoins, il n’est pas obligatoire de faire de cet ouvrage un traité sociologique. Les héros sont tels qu’ils sont et il pourrait être intéressant de découvrir la mise en place de leur plan sanguinaire de la même manière qu’on prend plaisir à découvrir le montage d’un holdup au cours d’un film de braquage. Mais ici, ce plaisir est inexistant. En enchainant les flashbacks, la trame nous mettre que les « cannibales » n’en sont pas à leur première fois. Néanmoins, était-il utile de consacrer autant de pages à ce qui se contente finalement d’être une grande orgie géante ?
La dimension philosophique et la planification logistique de leur rituel étant mis de côté, il ne restait plus qu’un aspect à développer : le moment où le plan ne fonctionne pas comme prévu et que la proie devient imprévisible. Il s’agit incontestablement de l’aspect le plus intéressant de la lecture. Dommage que cette partie démarre dans le dernier tiers du bouquin. Je me suis laissé prendre par la fuite en avant de cette jeune femme traquée par ces sept animaux malades. Mais le faible nombre de pages restant empêchait la poursuite de grimper suffisamment en intensité et en dramaturgie. Le dénouement arrive tellement vite que je n’ai pas eu le temps de profiter pleinement d’un moment qui aurait pu être angoissant et oppressant à souhait.
Au final, vous l’aurez compris Sept cannibales n’est pas à la hauteur de mes attentes. J’en espérais bien davantage. J’ai eu le sentiment d’avoir lu une histoire écrite rapidement sur le coin d’une table et dont le travail graphique ne peut pas compenser la faiblesse scénaristique. Il ne s’agit donc pas d’un des meilleurs opus de la série. Mais cette déception ne m’empêchera pas de jeter un coup d’œil sur les prochaines parutions de Sept. Un tome ne ressemble jamais au précédent…