Stigmates du passé : réelles ou image déformée de soi ? Après un incident de signalisation sur une ligne de RER mettant celui-ci à l'arrêt, il m'était impossible d'atteindre la gare en temps voulu pour attraper le TGV prévu pour me rendre dans le sud de la France. La seule alternative qui me restait pour tenter d'arriver à temps pour le départ du TGV était de prendre un taxi, mais... Ce fut une journée pleine en rebondissements et ce sera pour un autre récit. Ici, je ne traiterai que du premier rebondissement consécutif à l'incident du RER engendrant une conversation avec un jeune chauffeur de taxi.
Longue conversation entre un chauffeur de taxi et sa passagère sur les stigmates du passéLes embouteillages en plein Paris ne m'ont pas permis d'arriver rapidement à la gare, mais la jeunesse du chauffeur et sa façon avenante d'engager la conversation étaient propices aux échanges verbaux et ont agréablement agrémenté la course. Voici quelques réflexions après maturation de plusieurs semaines. Les bribes de conversations sont restées intactes en mon esprit. Faut dire que le sujet vaut vraiment la peine d'être débattu.
Se reprendre en mains : stigmates du passé sur l'avenir, incidence sur le présentPassé, présent, avenir : se reprendre en main après un parcours houleux de jeunesse demande de la persévérance dans l'effort pour se reconstruire une notoriété. Un passé difficile peut avoir des incidences sur le présent et le regard de l'autre peut être vécu comme dérangeant quand celui-ci est intrusif et manquant d'empathie. Il devient alors difficile de se reconstruire un avenir tout en sérénité.
Regard de l'adulte sur le jeune en devenirLe jeune transporte avec lui son passé et n'a pas le recul nécessaire pour l'accepter comme tel, comme une expérience unique formant un tout dans l'apprentissage de la vie. Il garde en lui les stigmates du passé, qui sont vécus par lui, comme une image déformée de lui. Son miroir ne lui restitue pas ce qu'il est vraiment : un être en devenir avec ses forces et ses qualités à développer. C'est-à-dire que le jeune reste fragile et n'a pas encore eu le temps nécessaire de renforcer sa personnalité.
Ses armes pour s'affirmer et faire valoir son droit ne sont pas encore affutées comme celles des requins aguerris au combat. Pour ne rien arranger, l'adulte n'a pas le regard compatissant devant ce jeune et attend de lui, sans intransigeance, une image parfaite sortie de ses schémas personnels en total décalage avec la réalité du jeune. L'adulte semble avoir oublié ce que lui-même a vécu dans sa jeunesse et n'a aucune pitié, comme le chasseur dans la jungle trouvant sa proie parfaite pour l'abattre avec délice.
Ce qui se voit, ce qui ne se voit pas : dépasser les apparences, se défaire des stigmates du passéApparence de soi : avoir des cicatrices sur le visage, consécutives à des incidents de parcours n'est pas très engageant lors d'entretiens d'embauche, par exemple. Ce genre de cicatrices apparentes sont telles plus graves que des cicatrices de l'âme, mais qui ne se voient pas ? Sur quel critère l'adulte se permet-il de juger le jeune ? L'apparence physique penche évidemment dans la balance, mais ce n'est certes pas une cicatrice qui va décider du sort de la personne. Celle-ci est visible et combien même ? Et visible pour qui, celui qui la porte où l'autre en face de lui ? Pour les bobos de l'âme, celles-ci, de cicatrices, ne se voient pas en première instance, mais après ? L'image que l'on a de soi est souvent déformée par de mauvais schémas de pensées. Pour moi qui est vu et parlé à ce jeune, rien ne m'a fait douter de ses valeurs et de ses compétences ? Alors ?
Se défaire des stigmates du passé, image de soi à valoriserL'effet miroir joue son rôle dans notre façon d'être. Le jeune qui doute de lui à cause de son aspect (ici les cicatrices, celles que je n'ai pas vues) aura une attitude de doute qui sera perçue par son interlocuteur. Une attitude, d'emblée assurée, aura plus d'impact et sera perçue comme positive. C'est ce que j'appelle l'effet miroir. Quel que soit le passé du jeune, son avenir reste à construire. Le présent ne doit pas s'embarrasser du poids du passé pour ne pas entraver sa force. Nous adultes, gardons à l'esprit notre passé avec nos interrogations, nos doutes. Sans tomber dans le maternalisme où le paternalisme, n'est-ce pas à nous de transmettre ce que nous avons de plus précieux ? C'est-à-dire, notre capacité à valoriser l'image de la personne plus jeune, qui est en face de nous ?
Image de soi à valoriser et stigmates du passé ne font pas bon ménagePour conclure : le regard des adultes (en général) sur les jeunes au passé difficile n'est pas vraiment empathique. Existe-t-il vraiment un respect envers les différences de statuts sociaux et générationnels des jeunes ? Cette impression de ne pas être reconnu du jeune : mythe ou réalité ? Merci de réagir pour alimenter ce débat. Avant de vous laisser la parole : le jugement hâtif ne mène nulle part. Savoir donner une chance et se féliciter après coup est toujours plus porteur de satisfactions que d'être, une personne démunie de tout sentiment. Le monde se construit avec l'espoir et la confiance en l'autre.