Stupéfaction (millimétrique) : l’audit des comptes de la Nation réclamé par le Premier Ministre sur la précédente mandature et réalisé par la Cour des Comptes vient de tomber et n’est absolument pas tendre avec les prouesses budgétaires de Hollande et sa fine équipe de branleurs coûteux (parmi lesquels officia jadis l’actuel Président, mais c’est sans lien). Sapristi, la situation est bien aussi catastrophique que ce qu’on imaginait !
Pour la Cour, pas de doute : avec les comptes et les budgets votés, on assiste à des « errements », des « biais de construction ». Pire, pour elle, les « textes financiers sont manifestement entachés d’insincérités ».
Entendre ça au sujet de budgets votés par les socialistes d’alors, c’est finalement rassurant puisque cela montre que la Cour des Comptes fait, malgré tout, un travail honnête d’analyse et d’audit. Ce n’est aussi absolument pas surprenant tant on savait déjà, depuis la quantité invraisemblable de cadeaux distribués par Hollande en fin de mandats jusqu’à l’état général des finances du pays et de ses déficits annuels toujours plus joufflus, que ceux qui nous gouvernent ont constamment poussé l’Etat français dans l’ornière avec une application, un cynisme et une obstination qui frise la compulsion mentale.
Et c’est d’autant moins surprenant que le constat de finances bidouillées et de budgets trompeurs s’ajoute aux bobards d’arracheurs de dents qui furent le lot commun des équipes hollandesques pendant les cinq années passées au sujet de l’emploi, chiffres du chômage en tête. Chômage qui ne fut guère combattu que par la distribution effrénée de formations bidons (qui valent maintenant des tracas à Pôle Emploi) qui n’aident vraiment personne, et l’embauche continue et à rythme soutenu d’agents dans le secteur public (à tel point que l’emploi dans ce secteur a augmenté presque deux fois plus vite que l’emploi privé pendant le quinquennat du Petit Moelleux).
Ce constat pitoyable posé, l’actuel chef de l’Etat va devoir remédier aux problèmes que posent ces manquements, ces errements et ces budgets consternant.
Une piste s’est déjà dessinée puisqu’Emmanuel Macron a clairement indiqué qu’il mettait la priorité de son action sur d’importantes réformes du Code du travail. D’ailleurs, les premières esquisses de cette réformes sont évoquées dans la presse qui trépigne visiblement d’impatience en rappelant avec insistance l’étendue de ces réformes et la méthode choisie (l’usage des ordonnances) pour les faire passer.
Et en effet, lorsqu’on lit que seront retravaillées les lois relatives aux accords d’entreprises et aux accords de branche, qu’on prévoit de fusionner les différentes instances représentatives en entreprise du personnel, qu’on envisage de fixer des barèmes aux indemnités de licenciement ou d’harmoniser les modes de licenciement, d’introduire le chèque syndical, de remettre sur le tapis le travail dominical et encore deux ou trois autres bricoles, on sait que cette réforme du Code du travail promet de grands moments de nervosité du côté des éternels grilleurs de merguez et autre professionnels de la grève coordonnée.
En effet, tant pour la presse que pour l’INSEE, non, le Code du travail n’est pas le premier frein à l’embauche. Comme l’expliquent tous les articles bâtis sur le même modèle à partir des résultats INSEE sur les barrières au recrutement dans ses enquêtes de conjoncture,
« Les embauches sont freinées par l’incertitude sur la situation économique (barrière citée par 28% des entreprises), la difficulté à trouver de la main d’oeuvre compétente (27% des entreprises), un coût de l’emploi jugé trop élevé (23% des entreprises) et par la réglementation du marché de l’emploi (18% des entreprises) »
Et voilà : la réglementation du marché de l’emploi n’arrive qu’en quatrième position, mes petits amis, c’est donc finalement relativement accessoire pour le patron moyen ! De fil en aiguille, il faudrait en conclure que le président Macron se lance donc sur un chantier annexe. Mieux : comme ce Code du travail ventripotent n’est, d’après l’INSEE (et tous les journaux derrière) que la quatrième et très mineure raison des difficultés observées, on se demande pourquoi on s’obstine à vouloir le modifier, n’est-ce pas…
Ces articles et cette enquête sont malheureusement symptomatique du mal français, cette mentalité passéiste qui voit systématiquement dans le Code, la Loi et l’encadrement tous azimuts par un Etat tout puissant l’unique solution aux problèmes qui nous occupent, et qui se trouvent donc automatiquement toutes les raisons de ne surtout pas y toucher.
Reprenons en effet les raisons invoquées comme frein à l’embauche, pour bien comprendre qu’elles ont la même racine, évidente.
Il ne semble en effet venir à l’esprit d’aucun des journalistes et des analystes de l’INSEE que l’incertitude économique est d’autant plus un frein à l’embauche que cette embauche se traduit immédiatement par d’insurmontables emmerdes administratives et financières si la situation se retourne et qu’il faut débaucher. L’économie est, par définition, toujours incertaine. D’ailleurs, l’Allemagne, les Etats-Unis ou l’Angleterre sont confrontés à la même incertitude économique et les entreprises ne se privent pourtant pas d’embaucher (et en tout cas, nettement moins qu’en France). Mais ces entreprises ont aussi une bien plus grande latitude pour réduire la voilure lorsque l’incertitude économique se traduit par un retournement.
Or, qu’est-ce qui joue le plus dans cette marge de manœuvre laissée aux entreprises, sinon le Code du travail ?
Le coût de l’emploi, jugé trop élevé, est une autre raison invoquée. On se demande foutrement bien qui impose ce méchant coût de l’emploi. L’article L3231-12 du Code du travail n’a bien sûr aucun rôle dans ce coût. Concernant les assurances (chômage, santé, vieillesse), il va de soi que le Code du travail n’y a là encore aucune responsabilité. Les coûts induits par ces assurances n’y sont donc pour rien. De même que personne ne pourra mettre l’invraisemblable tombereaux de cerfas et de démarches administratives à remplir à chaque embauche dans la case des coûts de l’emploi imputables à ce Code. Tout le monde sait que ces démarches et ces cerfas sont décidés unilatéralement par les entreprises, les syndicats ou le personnel de l’une ou l’autre mairie, pour le fun.
D’autre part, si le coût de l’emploi français ne dépendait pas du Code du travail mais, par exemple, du seul niveau de vie, on aurait alors beau jeu de se comparer avec d’autres pays où ce coût de l’emploi est nettement supérieur. Je pense ici à la Suisse où le salaire moyen est notoirement supérieur au français sans que le taux de chômage s’en rapproche, même de loin. Le Code du travail suisse est réputé pour sa maigreur comparé au français… Coïncidence ? Je ne crois pas.
Autrement dit, aux 18% qui imputent directement au Code du Travail les difficultés d’embauche, on peut aussi ajouter les 28% de l’incertitude économique et les 23% du coût de l’emploi. En somme, directement et (plus ou moins) indirectement, l’obèse Code du travail français est bel et bien responsable d’au moins 69% des réticences des entreprises à embaucher, et ce même si psychologiquement, il est manifestement très urticant pour les journalistes et pour l’INSEE de l’analyser dans les réponses qui leurs sont fournies.
Néanmoins, parions que cette analyse sera au mieux décriée, au pire complètement ignorée. On peut encore espérer qu’Emmanuel Macron fera malgré tout avancer sa réforme même si, au vu de ce qui est annoncé actuellement, son ampleur paraît bien trop modeste.
Pendant ce temps, d’autres pays progressent, plus pragmatiques, moins encombrés par de vieux principes collectivistes baignés d’une vision délicieusement marxiste de la société, et sabrent sauvagement dans leurs impôts. L’Irlande a largement montré que cela marche très bien. La Hongrie nous donnera un nouvel exemple.
Rassurez-vous : compte-tenu de sa mentalité, la France ne le suivra pas.