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Hier dans la journée, une manifestation de l'opposition a tourné au vinaigre. Comme c'est souvent le cas, les manifestants ont coupé la circulation sur la grande avenue 9 de Julio au cœur de Buenos Aires, une artère essentielle au trafic. Il est fréquent en effet que les grévistes et autres manifestants établissent des barrages (piquetes) aux méthodes très musclées. En l'occurrence, la presse publie ce matin des photos qui laissent peu de doute sur la violence d'un certain nombre de participants, dûment cagoulés, en train de lancer des pavés ou des grosse pierres sur les forces de police, elles-mêmes en grande tenue anti-émeutes.
Remarquez l'emploi de la même photo sur les deux unes opposées
avec seulement un changement de cadrage et de positionnement sur la maquette
Impressionnant !
Página/12 parle de violences policières : les forces de l'ordre auraient tiré des balles en caoutchouc contre la foule (supposée désarmée sans doute) et frappé les manifestants au gourdin, en les chargeant délibérément. Le journal titre l'article comme "Premier acte de la campagne de Cambiemos" (l'alliance électorale qui compose la majorité au pouvoir depuis décembre 2015).
Le reste de la presse décrit la situation strictement inverse : les manifestants auraient attaqué délibérément les policiers qui se seraient défendu et auraient repoussé les assaillants, comme il était de leur devoir de le faire, en usant de violence légitime. Selon La Nación, le gouvernement a changé son fusil d'épaule, si l'on me pardonne cette image : il a laissé de côté la méthode douce pour sortir les gros moyens dans l'espoir d'en finir avec la violence politique et sociale dans la rue.
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En Argentine, il est assez connu que les manifestants qui bloquent les routes ne sont pas tous, loin de là, des pacifistes ni de pieux démocrates. Et leur violence est d'autant plus crédible ici qu'on est désormais bien entré dans la campagne électorale de mi-mandat, que les syndicats viennent de bloquer les négociations du Conseil national du Salaire, qu'ils rejettent le décret d'augmentation du salaire minimum que le gouvernement a dû prendre pour compenser l'absence d'accord entre partenaires sociaux et que l'ex-présidente Cristina Kirchner vient d'officialiser son entrée en lice en déposant sa candidature au Sénat dans la province de Buenos Aires. Il est très probable que ses partisans cherchent à décrédibiliser le gouvernement, à le mettre en difficulté pour ramener l'électorat vers le vote kirchneriste auquel il n'est toujours pas acquis, malgré la relance de l'inflation, la stagnation relative des salaires de la classe moyenne et les statistiques effrayantes concernant le niveau de pauvreté dans le pays (un tiers de la population).
Pour en savoir plus : lire l'article de Página/12 lire l'article de Página/12 sur le refus du décret salarial de la part des trois centrales syndicales lire l'article de La Nación lire l'article de Clarín lire l'article de Clarín sur la colère du président Macri contre la municipalité de Buenos Aires qui ne parvient toujours pas à contenir l'action des provocateurs kirchneristes (1) lire l'article de Clarín sur l'incident qui révèle les contentieux entre syndicalistes : le leader historique de la CGT, Hugo Moyano, a été fichu à la porte par la famille du défunt lorsqu'il est venu rendre ses hommages à un autre leader syndicaliste, le premier à s'être rallié à Mauricio Macri après son élection, le Mono Venegas, décédé en début de semaine.
(1) Bien évidemment, ce côté-là de la gauche pourra toujours se défendre en disant que les lanceurs de pavés étaient des provocateurs placés là par les services de l'Etat. Mais ce jeu des accusations de manipulation est sans fin et chaque camp peut le sortir contre l'autre.