Paul Lecorre est né à Saint-Michel-de-Wentworth, une de ces délicieuses régions urbaines que je découvre avec mes camions quelques jours par semaine depuis avril.
J'ai connu trois Tex Lecor.
Rencontrons d'abord celui de mes parents:
Son père est d'origine bretonne. Il est artiste, homme de théâtre et politicien local venu vivre son amour des grands espaces au Canada d'Amérique. Très jeunes, Paul, son jeune frère et sa jeune soeur apprennent l'amour de la nature, de l'art et de la mer.
Paul étudie à l'école des Beaux-Arts de Montréal de 1951 à 1958.
Sur 7 ans, il côtoie Armand Vaillancourt. En 1956, il hérite déjà du surnom de Tex en raison d'une ceinture qu'il aime porte arborant le mot "TEXAS" et dont les seules trois premières lettres paraissent encore après un séjour sur la côte Ouest canadienne.
Il habitera le coeur de Montréal, là où je voudrais finir mes jours, rue Ste-Famille, puis rue Cherrier.
Il travaillera pendant 6 étés comme capitaine de caboteur en Gaspésie. Il y fera la rencontre d'un mécène d'origine juive qui achète toute son oeuvre en peinture jusqu'à maintenant.
Il se dégage une image, tout ce qu'il y a de plus naturelle, de coureur des bois un brin rebelle de Tex Lecor. Chansonnier amateur, il passe en studio et enregistre ses compositions, en pro. Ses chansons trouvent un écho certain au Québec. Tex rend de bonne humeur.
En 1969, il affiche de réelles couleurs politiques et devient plus populaire encore dans la foulée de l'essor du mouvement souverainiste. Il atteint des sommets inégalés deux ans plus tard en adaptant une chanson du chansonnier madelinot George Langford. Le Frigidaire le rend financièrement sans souci.
Il composera un classique miséreux de Noël. Encore beaucoup joué par chez nous, de nos jours.
Il fera de la musique dans les années 70 aussi. Formé de la sorte, il peindra toute sa vie. D'abord dans les traits sombres des années 50, ce qui ne laisse pas deviner le fin coloriste qu'il deviendra plus tard. Il ne se prend pas toujours au sérieux ce qui le rend sympathique à tous.
Figure populaire, on lui fait animer à la télé naissante de télé-métropole, une émission de variétés oscillant entre la musique et le conte.
Mon Tex Lecor, je le découvre à partir de 1974. Mes parents sont des fidèles de l'émission humoristique hebdomadaire radio Le Festival de l'Humour. Jusqu'en 1989, Louis-Paul Allard (le straight man), Roger Joubert (le Français pianiste), Pierre Labelle (l'imitateur) et lui (l'à peu près toute) animent une émission parfaitement disjonctée qui fait rire le Québec en voiture.
Lecor abandonne la chanson en 1978. Il se consacre alors à sa passion de toujours: la peinture. Il devient aussi pilote de brousse et voyage en aventurier d'un océan à l'autre. Ramenant en peinture des décors explorés ou des commandes de collectionneurs.
Il sera vedette de quelques publicités qui misent toujours sur sa simplicité. La publicité l'a fait travaillé avant quoi que ce soit, mais il s'était lassé du 9 à 5 bien assez vite.
Peintre paysagiste pour le restant de ses jours, il inscrit son oeuvre dans la tradition figurative de Marc-Aurèle Fortin, Clarence Gagnon ou encore des peintres du groupe des 7. Intransigeant défenseur de la nature, il l'immortalise en peinture. Son oeuvre est empreint de nostalgie inspirée de ses nombreux voyages en territoire nordique.
Il revient aussi à la radio dans la branche humoristique.
De 1998 à 2010, il coanime à la télé une émission pour aînés sur les ondes de TQS retrouvant ses amis Allard, Joubert et Shirley Théroux, qui pour sa part, remplace (feu) Pierre Labelle comme ancien complice.
Il est décoré de l'ordre de la Pléiade en 2010.
Puis du Prix Pierre Bourgault, la même année.
Tex a eu 84 ans, il y a deux semaines exactement.
C'est la fête du Québec aujourd'hui.
C'est notre fête à tous.
Québécois de naissance, d'adoption ou d'atterrissage forcé.
Franco, anglo, toutes langues unies.
Salut!