La santé est le bien le plus précieux de l'individu. Sans elle, toutes nos
activités sont, au mieux limitées, au pire interdites. Elle est un patrimoine
individuel et collectif qui mérite toutes les attentions, et pour laquelle
l’humanité a forgé, à l'aube des temps, les premières grandes solidarités.
Il est particulièrement regrettable que des erreurs de communication
manifestes aient marginalisé la question de notre modèle de santé lors de la
présidentielle, et qu'une récente affaire ternisse l'image d'un acteur
fondamental : la Mutuelle.
À l'évidence, il est pourtant très urgent de revisiter notre système de
santé, conçu à un autre siècle, à un moment ou les professionnels de santé se
sentent mal aimés et/ou des acteurs administratifs et économiques sortent de
leur rôle. Comme souligné, à juste titre par F. Bizard, économiste de la santé
("Politique de santé, réussir le changement"), en termes de santé
comme en matière de chômage ou de retraite, nous sommes passés d'un risque
court à un risque long. Il importe dès lors d'individualiser la démarche pour
responsabiliser le citoyen notamment en valorisant l'information et la
prévention.
Il est surtout indispensable de revenir a des fondamentaux, trop longtemps
perdus de vue, en matière de santé il n'y a que 2 acteurs qui comptent. Le
citoyen financeur et patient et le professionnel de santé, qui jouit de la
confiance, autorisée par les études suivies et le dévouement avéré. Tous les
autres intervenants, ne sont que des prestataires administratifs ou industriels
et doivent rester cantonnés à ces rôles. Convenons que nous sommes loin du
compte quand on voit la main mise de la bancassurance ou le poids des
industries du médicament.
Il est pour le moins paradoxal, à l'heure du client roi qui pilote, et du
prestataire fournisseur qui s'efforce de satisfaire la demande, de constater
que le rapport est inversé en matière de santé ! Le citoyen patient
"client" doit rester libre du choix de son
"fournisseur" et être acteur de sa santé par son comportement, sa
lucidité et son refus de toute aliénation mercantile ou administrative.
Une connaissance assez précise des réalités de terrain donne à penser
qu'un citoyen sensibilisé et informé est le premier vecteur d'une politique de
santé responsable. Ainsi lors de la mise en place du médicament générique,
au sein d'une mutuelle "historique", un message ciblé a permis de
peser sur la consommation médicamenteuse et le comportement de milliers de
sociétaires, érigés en ambassadeurs d'une stratégie partagée avec les
professionnels de santé prescripteurs.
Mutatis Mutandis, c'est cette approche qui doit être privilégiée, en
partant de la prévention pour se prolonger par le curatif médicamenteux et
réparateur. Toutes les données montrent que l'investissement dans le préventif
offre un formidable taux de retour en matière d'économies en aval. Il suffit
d'affirmer une vraie volonté politique de choix sociétal en résistant aux
différents lobbies et petits intérêts, et en identifiant le soin comme un
maillon d'un ensemble plus vaste, le système de santé, lui même pilier d'un
modèle social rénové.
Cela posé, il faut ouvrir très vite plusieurs chantiers simples qui vont
cibler les vrais acteurs habilités. Dans le même temps, il faut identifier
les axes prioritaires de recherches, en fonction de priorités de santé publique
incontestables. Cela est aisé, car les déterminants forts de santé sont connus.
Avec une telle ambition, l'acteur évident est le citoyen
financeur/patient. Dés lors son éducation à la prévention et à la santé est
indispensable. Il faut aussi identifier l'instrument institutionnel le plus
efficace pour que ce citoyen soit force de proposition entendue et suivie. Une
force qui doit apprendre à mieux connaître les professionnels de santé, dans
leurs pluridisciplinarités, pour conforter le lien de confiance et éviter que
des intermédiaires viennent brouiller les cartes.
Ce doit être l'objectif d'états généraux à réunir d'urgence. Temps de
construction où la vraie mutuelle démocratique et transparente doit prendre
toute sa place, à condition que rien ne brouille son image et ne la banalise
dans l'esprit du grand public.