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Réunis le 12 juin à Bruxelles, les ministres de l'Agriculture de l'UE ont décidé de poursuivre les discussions en trilogue avec le Parlement et la Commission européenne et n'ont pas (encore) voté le nouveau règlement de l'agriculture biologique.
Lire l'article : L'agriculture biologique sous la menace de Bruxelles
Rappelons que plusieurs points du projet soumis au vote étaient refusés unanimement par les opérateurs de la bio en France qui l'avaient fait savoir à leur ministre avant la réunion :
1/ Tout d'abord, laisser les Etats-membres décider du seuil de contamination accidentelle par les pesticides déclenchant le déclassement des produits bio. Ce seuil aurait été variable d'un Etat à l'autre alors que les produits circulent librement dans l'UE. La filière demande un déclassement automatique en cas de contamination comme c'est le cas aujourd'hui.
2/ Ensuite, n'imposer des contrôles que tous les deux ans à certains opérateurs. Le cahier des charges de l'agriculture biologique est rigoureusement contrôlé tous les ans par des organismes certificateurs indépendants. Le contrôle concerne à la fois les pratiques agricoles (culture sans pesticide chimique, élevage sans antibiotique...) et les produits (analyses d'échantillons). Ce qui évite les dérives et rassure les consommateurs.
3/ Enfin, la commission voudrait autoriser la culture " hors sol " dans certains pays. C'est contraire au principe de l'agriculture biologique qui tient au lien au sol à la fois pour la qualité des productions et pour des raisons environnementales.
Faire évoluer la réglementation sur les semences
Reste un sujet non réglé qui a déclenché la révision du règlement : les demandes de dérogations d'opérateurs de la bio concernant les semences végétales et celles des animaux d'élevage (la plupart des animaux étant aujourd'hui inséminés artificiellement).
Pourquoi ces demandes de dérogations ? Le règlement de l'agriculture biologique impose que les semences végétales utilisées pour les cultures bio soient bio et que les animaux élevés par les agriculteurs bio soient nés selon le cahier des charges de l'élevage bio. Faute de trouver assez de semences en bio, les agriculteurs se fournissent en conventionnel mais ils ne peuvent le faire sans obtenir de dérogations car tous les produits bio sont tracés depuis ceux utilisés aux champs jusqu'à la collecte.
Le problème est réel mais le nouveau règlement de agriculture biologique ne pourra pas le résoudre. Il n'y a pas assez de semences bio sur le marché, c'est un fait. Et celles qui sont disponibles ne sont pas adaptées à la bio, elles ont été conçues en laboratoire pour fonctionner avec des pesticides. Les producteurs bio souhaitent des semences végétales rustiques qui se développent bien sans traitement chimique.
Le problème est similaire en élevage : les semences que l'on trouve sur le marché sont issues de la sélection génétique qui produit des animaux conformes aux besoins des industries mais qui sont plus fragiles. De nombreuses races d'animaux rustiques (peu sensibles aux maladies, résistantes au froid, capable de vêler sans aide...) ont disparu ou survivent en petit nombre. C'est la réglementation actuelle encadrant les semences qui devrait être revue. Celle-ci interdit la reproduction et la vente de la plupart des semences végétales rustiques pour protéger les recherches des semenciers, un peu comme si on interdisait tous les autres trains pour protéger les recherches sur le TGV.
Il est peu probable que la législation sur les semences sera abordée dans le trilogue qui se poursuit entre institutions européennes. Elles veulent pourtant parvenir à un accord sur le règlement de l'agriculture biologique sous la Présidence maltaise (d'ici le 30 juin) et le faire adopter par les ministres en juillet sous présidence estonienne. La mobilisation des professionnels et des consommateurs est importante pour maintenir voire améliorer le règlement existant.
Anne-Françoise Roger