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Ces mains ont semé planté bêché cueilli pétri,
Elles ont ramassé des cèpes, les ont cuisinés,
Ces mains ont chassé pêché ramé écrit construit,
Elles ont aimé ses frères, sa sœur, ma mère,
Il s’en est fallu de peu pour qu’elles ne touchent plus,
et n’essuient plus de larmes.
J’ai effleuré ces mains sur un lit d’hôpital,
j'y ai puisé la force de continuer à vivre, aimer et rire.
Papa, ce poème, tu ne le connaissais pas.Les mots qui l'irriguent sont une preuve de l'amour que je te porte.
Une sorte de rempart que j'érige contre la maladie qui t'abîme.
Ce que je vais te dire te semblera bien naïf, venant de moi, un presque jeune homme bien portant, qui ne connaît pas, comme toi, dans sa chair, dans son âme, la souffrance, la privation de ses capacités d'antan...
Mais je te le dis avec amour :
Tu es vivant, tu as sous les yeux, auprès du cœur une femme, deux enfants, trois merveilleux anges que sont tes petites-filles, un jardin que tu ne pourras certes pas modeler entièrement selon ton désir mais qui te réserve ses éclats de surprises, de bonheur. Tu as à portée de main ces mésanges, rouges-gorges et chardonnerets, que tu guettes du coin de l'œil, cette chatte que tu as apprivoisée et qui accourt à ton approche des arbres fruitiers endormis. Ce jardin ou un autre. Ces ingrédients qui attendent de se frotter à ton inventivité, ton talent de cuisinier.
Et les millions d'instants qui éveillent ton amour de la vie et ton âme d'enfant.
Aujourd'hui je reprends ce texte et tu n'es plus là,
Je pense à toi.