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Une tragi-conférence à la romaine. DELENDA CARNOT EST !

Publié le 10 juin 2017 par Halleyjc

Une tragi-conférence à la romaine. DELENDA CARNOT EST !

C’était un vendredi de décembre 1969, dans l’amphithéâtre de l’Ecole Normal de Pointe-à-Pitre, une réunion publique destinée à verser une larme sur le bon vieux Lycée CARNOT condamné à la démolition…

Se joua alors dans cette salle une véritable tragédie non pas grec, mais romaine…

Après que le sujet ait été présenté, l’organisateur passa le micro aux membres du Sénat réuni sur la table d’honneur… Et ce fut à tour de rôles plusieurs Intervenants savants en sciences urbanistiques qui s’exprimèrent en termes châtiés. Le public semblait  impassible. Chaque péroraison était ponctuée par la célèbre phrase que Caton répétait inlassablement au Sénat fustigeant les dangers de laisser la puissance punique se développer et réinventée à cette occasion : « il faut détruire Carnot ».

Caton terminait en effet toutes ses interventions, (peu importe le sujet!) par cette célèbre formule: « Il faut détruire Carthage » (Carthago delenda est dans la langue de Tite-Live).

Ce soir là chacun semblait convaincu alors que Carnot delenda est.

Et soudain au milieu de cette salle se leva non pas Scipion Nasica, mais un petit bonhomme d’architecte qui sans doute du fait de son métier de bâtisseur et aussi de ses convictions… conclut ses propos en prônant l’exact opposé (« nihil temere faciendum ») ! Ambiance, Ambiance !

Oui l’ambiance guerrière et destructrice de la salle se mua en un petit « Rien sans un but » qui proposa un « non » muant le dictat de Caton en un « Carnot non delenda est »… On raconte que Caton parvient à convaincre le Sénat d’agir grâce à une… figue. « Sachez qu’elle a été cueillie il y a trois jours à Carthage ; voilà à quelle proximité nous sommes de l’ennemi. » Cette petite mise en scène suffit, suivant la légende, à décider de la troisième guerre punique. Ce soir là aucune figue ne fut montrée, mais l’intervenant fit simplement un rêve qu’il sut faire partager à l’assistance.

Et c’est ainsi que grâce à la clairvoyance d’un architecte, petit par la taille, mais grand par le talent, le Lycée Carnot ne fut pas détruit.

Pour ne pas encombrer le récit et pour l’histoire de notre cher Lycée Carnot ci-après les initiales de quelques acteurs de cette tragi-conférence.

  • L.F. l’organisateur de la conférence initialement destinée à verser une larme sur Carnot
  • H.B. l’ordonnateur de la destruction de Carnot
  • J.T. l’exécuteur de la démolition reconstruction
  • D.R. le Scipion Nasica du jour
  • J.S. le futur locataire du futur et nouveau Lycée.
  • JC.H. qui perdit son emploi à la suite de cette histoire.

Chutes !

  • Le lundi suivant la conférence, l’Architecte du projet fut renvoyé à ses crayons pour trouver une solution intégrant la non démolition du site.
  • On ne saura jamais quel aurait été le nom de ce nouveau Lycée.
  • Un seul journal parla de cette conférence : le Progrès Social du samedi suivant. Le journaliste de service ne savait pas alors qu' »in fine » Carnot ne serait pas démoli….

Loin de moi l’idée de comparer la démolition de Carnot à ce que les archéologues estime être « L’Hiroshima du monde antique », mais avouez que c’eut été dommage de détruire ce monument.


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